Niveau juridique : Union européenne
Lors de cette réunion, la délégation autrichienne a souhaité avoir un échange sur la réforme de la réglementation sur les nouvelles techniques génomiques. Soutenue par les délégations chypriotes, luxembourgeoise et hongroise, elle a transmis une note d’information dans laquelle elle se montre plutôt critique envers l’étude d’impact initiale menée par la Commission.
Ainsi, dans cette note, l’Autriche exprime clairement sa position : elle approuve le raisonnement de la Cour de justice de l’UE, qui, dans son arrêt de juillet 2018, estimait que les nouvelles techniques génomiques étaient réglementées par la directive 2001/18. Elle met en avant l’application du principe de précaution pour exprimer des réserves quand à la proposition faite par la Commission de modifier la réglementation relative aux plantes obtenues par mutagénèse dirigée et par cisgénèse. Pour rappel, les éléments centraux de cette nouvelle réglementation présentée par la Commission dans la pré-étude d’impact sont : une évaluation des risques « proportionnée », une évaluation de la durabilité et des exigences de traçabilité et d’étiquetage, liées à la durabilité.
Pour l’Autriche, il est important de garantir la liberté de choix des consommateur.trice.s, en assurant un système de traçabilité et d’étiquetage fiable et complet. Concernant l’analyse de durabilité, la délégation met en avant le fait qu’il manque encore des informations concernant les paramètres pertinents, et qu’aucun critère ni méthodologie ne sont détaillés. L’Autriche demande donc à la Commission de respecter le principe de précaution, notamment compte tenu de la nouveauté de ces techniques, et de prévoir une évaluation complète des risques pour l’environnement et la santé, comparable à celle mise en place pour les OGM. Elle enjoint aussi à la Commission d’investir dans la recherche concernant la détection et la biosécurité des produits issus des nouvelles techniques génomiques.
Enfin, elle invite la Commission européenne à se saisir de la question avec le Conseil, le Parlement européen et toutes les parties prenantes de manière « large et transparente ».
Lors de la réunion du Conseil environnement du 20 décembre 2021, un point mis à l’ordre du jour a permis aux ministres des différents Etats membre de s’exprimer sur le sujet. Ces prises de parole permettent de montrer les lignes de fractures entre les Etats. Pas moins d’une quinzaine de ministres ont pris la parole à cette occasion. Alors que la France, Chypre, le Danemark, la Tchéquie ou les Pays-bas se félicitent de l’analyse faite par la Commission et approuvent ses conclusions, l’Autriche, le Luxembourg, la Slovaquie, l’Allemagne, la Bulgarie, la Hongrie, l’Estonie ou encore Chypre se montrent plus réservés, voir critiques.
Plusieurs Etats (parmi lesquels le Luxembourg, l’Allemagne, la Bulgarie…) sont désireux d’éclaircissement sur cette notion d’analyse de durabilité et son lien avec l’analyse de risque. Ils soulignent aussi l’importance de garantir la transparence, la liberté de choix des consommateur.trice.s et la possibilité de coexistence entre plusieurs types d’agriculture. Ils estiment que l’analyse de la Commission n’est pas complète et que trop d’aspects, notamment la question des conséquences sur la santé humaine, animale et environnementale n’est pas assez prise en compte, au profit des aspects économiques. La Hongrie va même jusqu’à regretter que l’analyse de la Commission se focalise sur les aspects positifs de ces nouvelles techniques, aspects positifs qui, selon elle, ne sont pas encore prouvés… La ministre allemande s’est aussi montrée particulièrement virulente ; on notera d’ailleurs qu’elle est la seule à avoir parlé de « nouveaux OGM », les autres préférant utiliser les termes « nouvelles techniques de sélection » ou « nouvelles techniques génomiques ».
Sans surprise, la France et les Pays-bas ont réitéré leur position très « progressiste » sur la question, estimant que la réglementation actuelle n’était plus adaptée, et qu’il était nécessaire de faciliter le développement et l’usage des plantes issue de ces techniques, seules à même de pouvoir permettre d’atteindre les objectifs du pacte vert européen. C’est d’ailleurs peu ou prou ainsi qu’a conclu le représentant de la Commission européenne, qui s’est exprimé en dernier. Il a cependant assuré que, pour la construction de la proposition de texte, des consultations larges et des échanges avec les différents protagonistes seraient organisés. Selon lui, si tout se passe bien, la proposition législative pourrait être présentée au printemps 2023.
Communication de l’Autriche « Regulation of plants obtained by new genomic techniques –need for coordinated action-Information from the Austrian delegation, supported by the Cyprus, Luxembourg and Hungarian delegations, 14714/1/21REV 1 » à retrouver ICI
Lien vers les enregistrements des échanges ICI.