Projet d’ordonnance relative à l’évolution des modalités d’évaluation des biotechnologies et à la simplification de la procédure applicable aux utilisations confinées de risque nul ou négligeable d’organismes génétiquement modifiés

Niveau juridique : France

En décembre 2020, la loi de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 et portant diverses dispositions relatives à la recherche et à l’enseignement supérieur (voir fiche veille) avait habilité le Gouvernement à légiférer par voie d’ordonnance dans différents domaines normalement réservés à la loi, en particulier la procédure d’évaluation des risques en matière d’OGM et l’avenir du Haut Conseil des biotechnologies (HCB). C’est l’objet de ce projet d’ordonnance dite relative à l’évolution des modalités d’évaluation des biotechnologies et à la simplification de la procédure applicable aux utilisations confinées de risque nul ou négligeable d’organismes génétiquement modifiés. La Charte de l’environnement prévoyant la participation du public aux décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement, le Gouvernement a donc été obligé d’organiser une consultation du public. Cette dernière s’est déroulée en ligne, du 2 au 23 août 2021.

L’objet de cette ordonnance est d’une part de réduire l’évaluation des OGM en milieu confiné et d’acter la suppression du Haut Conseil des biotechnologies (HCB).

L’évaluation des OGM en milieu confiné

Cette ordonnance vise clairement à simplifier voir supprimer les procédures relatives à l’utilisation confinée d’OGM de risque nul ou négligeable (utilisation confinée de classe 1).

Ainsi, alors que jusqu’à présent le droit français imposait une déclaration systématique pour toute utilisation confinée d’organismes génétiquement modifiés de risque nul ou négligeable (utilisation confinée de classe 1), l’ordonnance prévoit qu’une utilisation confinée de classe 1 est possible sans nouvelle déclaration lorsqu’elle se déroule dans une installation où une utilisation confinée de classe 1 ou supérieure a déjà été autorisée dès lors qu’une évaluation des risques pour chaque utilisation est tenue à la disposition de l’autorité compétente. Pour ce faire, l’ordonnance introduit la notion d’agrément d’installation, qui s’obtient lors de la déclaration d’une première utilisation confinée d’OGM de classe 1 (ou l’autorisation d’utilisation confinée d’OGM de classe 2 à 4).

Seule dérogation à cette simplification : le cas des recherches impliquant la personne humaine (RIPH) faisant intervenir des médicaments composés en tout ou partie d’OGM (médicament de thérapie génique, vaccin).

A noter que cette notion de « risque nul ou négligeable pour l’environnement et la santé publique » n’est pas clairement définie dans les textes, et est donc à discrétion de l’autorité administrative…

Ce projet d’ordonnance envisage également une possibilité de dérogation aux procédures d’évaluation en cas d’urgence sanitaire ou environnementale.

Suppression du HCB

Selon les termes de la présentation du texte, « [l]’ordonnance prévoit également le transfert des missions du HCB vers différentes instances désignées. L’expertise scientifique actuellement menée par le Comité Scientifique du HCB est transférée à l’Anses, en ce qui concerne les utilisations disséminées, et à un comité d’experts placé auprès du MESRI (Ministère de la recherche et de l’innovation - NDR) et dont la composition et les missions seront définies par décret, pour avis sur les dossiers relatifs à une utilisation confinée. Les missions actuelles du Comité économique, éthique et social seront assurées par l’Anses, le Conseil Économique Social et Environnemental (CESE) et le Comité consultatif national d’éthique (CCNE). L’Anses fournira une expertise socio-économique grâce à un comité d’experts qui sera mis en place, le CESE pourra être saisi sur toute question sociétale relative aux biotechnologies, et enfin, le CCNE sera en charge des questions éthiques.

Un comité de dialogue sera également mis en place à l’Anses, qui possède une grande expérience en matière d’ouverture et de dialogue avec la société sur des sujets controversés. Ce comité n’aura pas pour vocation de produire des recommandations en son nom, mais les échanges et débats qui auront lieu en son sein permettront de contribuer à la robustesse et la recevabilité des travaux scientifiques menés. »

Contrairement à la situation antérieure, où une seule instance, le HCB, se prononçait sur ces questions relative aux OGM, en combinant une évaluation scientifique (à travers le comité scientifique) mais aussi économique, éthique et sociale, à travers le CEES (Comité économique, éthique et social qui réunissait des représentants des organisations paysannes et de la société civile), l’évaluation sera donc à présent répartie entre trois instances différentes. Même si le fonctionnement du HCB avait été maintes et maintes fois critiqué pour ses problèmes de gouvernance (pour le contexte, voir cette fiche veille), sa suppression sonne le glas d’une évaluation et d’un débat véritablement démocratique et pluriel sur les questions relatives aux OGM.

A noter toutefois que les compétences du comité consultatif national d’éthique et du CESE sont clarifiées et semblent plus larges qu’auparavant.

Avec ce nouveau mode d’évaluation, les paysan.ne.s et tous les membres de la société civile sont de fait relégués à l’arrière-plan, exclus du débat et leur avis négligé.

Lien vers la page de la consultation ici

Lien vers le texte de l’ordonnance ici

Voir aussi :

Communiqué de presse de la Confédération paysanne

Inf’OGM, Une consultation pour modifier l’évaluation des OGM, Christophe NOISETTE