[CONSULTATION TERMINEE] Ministère de l’Agriculture, Consultation publique : projet de décret relatif à la modification de la liste des techniques d’obtention d’organismes génétiquement modifiés ayant fait l’objet d’une utilisation traditionnelle sans inconvénient avéré pour la santé publique ou l’environnement, du 7 au 28 mars 2025

Niveau juridique : France

Texte de la consultation :

Contexte

« On distingue différentes techniques de mutagénèse. La mutagénèse aléatoire consiste à augmenter la fréquence naturelle des mutations d’un organisme par l’action de produits chimiques ou de rayonnements. C’est une technique utilisée couramment pour la sélection variétale depuis longtemps. Elle peut être appliquée in vivo (sur des graines, des plantules ou des parties de plantes) ou in vitro (sur des cellules végétales cultivées in vitro). Les nouvelles techniques de mutagénèse, plus récentes, consistent à générer des mutations en un endroit précis du génome d’un organisme en utilisant des outils de génie génétique (par exemple CRISPR-Cas9).

Le code de l’environnement prévoit, en application de la directive européenne 2001/18 sur les OGM, que les organismes obtenus par mutagénèse ne sont pas soumis aux obligations de la réglementation sur les OGM, sans préciser les techniques de mutagénèse visées.

Dans le cadre de recours engagés par la Confédération paysanne et d’autres organisations sur la mutagénèse et les variétés rendues tolérantes aux herbicides, le Conseil d’Etat a interrogé à deux reprises la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) afin de clarifier l’interprétation du droit européen concernant le statut juridique des techniques de mutagénèse vis-à-vis de la réglementation OGM.

Le 1er arrêt de la CJUE, rendu le 25 juillet 2018, concluait que tous les organismes obtenus par mutagenèse sont des OGM et que seuls sont exclus du champ d’application de la directive 2001/18 ceux qui sont issus de techniques de mutagenèse qui ont été traditionnellement utilisées pour diverses applications et dont la sécurité est avérée depuis longtemps. Il en découle que les nouvelles techniques de mutagénèse, développées après l’adoption de la directive en 2001, et les organismes qui en sont issus, sont soumis aux obligations de la réglementation OGM. Il ressort du 2ème arrêt de la CJUE, rendu le 7 février 2023, que les organismes issus de mutagénèse aléatoire in vitro sont exemptés de la réglementation OGM, au même titre que ceux issus de mutagénèse aléatoire in vivo.

Dans sa décision du 23 octobre 2024, le Conseil d’Etat a enjoint au Gouvernement d’adopter un décret modifiant l’article D. 531-2 du code de l’environnement pour préciser la liste limitative des techniques ou méthodes de mutagénèse traditionnellement utilisées pour diverses applications et dont la sécurité est avérée depuis longtemps. Il s’agit de préciser la liste des techniques de mutagénèse qui produisent des organismes exemptés de la réglementation relative aux OGM.

Objectifs du projet de décret

Le projet de décret a pour objectif de modifier l’article D. 531-2 du code de l’environnement pour préciser la liste des techniques de mutagénèse produisant des organismes exemptés de la réglementation relative aux OGM conformément aux arrêts de la CJUE et à l’injonction du Conseil d’Etat. Le projet de décret précise ainsi qu’il s’agit des techniques de mutagénèse aléatoire.

Cette disposition implique que les organismes obtenus par une technique de mutagénèse aléatoire, qu’elle soit appliquée in vivo ou in vitro, sont exemptés de la réglementation OGM, alors que ceux obtenus par d’autres techniques de mutagénèse, telles que les nouvelles techniques de mutagénèse dirigée, sont soumis aux obligations de la réglementation OGM.

Ce décret n’entraîne pas de changement dans l’application de la réglementation sur les OGM étant donné que le Gouvernement applique déjà les arrêts de la CJUE de 2018 et de 2023.

Ce décret s’appuie sur la réglementation européenne actuelle sur les OGM, telle qu’interprétée par la CJUE et le Conseil d’Etat. Il ne préjuge pas d’une éventuelle évolution de cette réglementation européenne. »

Cette consultation s’inscrit dans le cadre du recours contre les variétés rendues tolérantes aux herbicides (VrTH). En effet, l’arrêt du Conseil d’État du 23 octobre 2024 (voir ICI) a enjoint au Gouvernement d’adopter d’adopter un projet de décret modifiant l’article D. 531-2 du code de l’environnement, qui fixe la liste des techniques permettant l’obtention d’organismes génétiquement modifiés qui ne sont pas soumis aux obligations pesant sur les OGM. Il s’agit de tenir compte des arrêts de la CJUE des 25 juillet 2018 et 7 février 2023, qui ont précisé les critères d’exemption des OGM issus de mutagenèse aléatoire.

Ce projet de décret a déjà fait l’objet d’un avis de l’ANSES (voir ICI). Il est à présent soumis à consultation publique : les parties prenantes ont jusqu’au 28 mars 2025 pour faire leurs retours sur le texte.

Résulats de la consultation

23 contributions ont été reçues, 16 déposées par des citoyen.ne et 5 par des organisations. Une dizaine de contributions expriment un avis favorable au projet de décret, soulignant que ce décret ne fait qu’appliquer les décisions du Conseil d’État et qu’il viendra dissiper l’incertitude juridique concernant le statut des plantes obtenues par mutagénèse aléatoire. Deux contributions précisent que les propositions alternatives contenues dans l’avis de l’Anses leur conviennent également. Une autre demande un débat de fond sur les OGM. Quatre contributions expriment un avis défavorable au projet de décret, estimant que tout organisme obtenu par une technique de mutagénèse (aléatoire ou non, appliquée in vivo ou in vitro) ne devrait pas être exempté de la réglementation OGM. Une contribution pointe le fait que ce projet ne précise pas ce qu’est la mutagénèse aléatoire, et demande un étiquetage précisant la technique utilisée lorsqu’une variété est commercialisée. Enfin, cinq contributions se sont saisies de cet espace pour exprimer des avis plus large sur les OGM, les NTG ou encore la mutagénèse, sans se prononcer directement sur le projet de décret.

La consultation s’étant clôturée le 28 mars 2025, on attend incessamment sous peu la publication du décret. En l’absence cependant d’obligation pour les obtenteurs de révéler leurs méthodes de sélection, et vu l’imprécision des termes utilisés, l’impact de cette clarification juridique reste limitée.

Lien vers la consultation ICI