Niveau juridique : Union européenne
L’Autorité européenne de sécurité des aliments est régulièrement sollicitée par la Commission européenne pour la production d’études relatives produits issus de nouvelles techniques de modification génétique. Ainsi, elle avait été saisie le 20 mai 2020 par la Commission pour l’éclairer scientifiquement sur les distinctions existantes entre la technique de la mutagenèse aléatoire in vivo et la mutagenèse aléatoire in vitro.
Cette saisine fait suite à la décision du Conseil d’État français du 7 février 2020 qui qualifie d’OGM réglementés les plantes obtenues à partir de techniques de mutagenèse dirigée, mais aussi de mutagenèse aléatoire in vitro soumettant des cellules de plantes cultivées in vitro à des agents mutagènes chimiques.
Or, la Commission européenne considère que rien ne justifierait d’un point de vue scientifique la distinction opérée entre les techniques de mutagenèse aléatoire in vivo et in vitro. De ce fait, les plantes issues de cette deuxième technique ne devraient pas être considérés comme des OGM réglementés au sens de la directive européenne sur les OGM n°2001/18/CE. Elle soumet ainsi à l’EFSA la demande suivante : « Les États membres n’ont jamais fait de distinction entre in vitro et in vivo, que ce soit lors de la mise en œuvre de la législation sur les semences, sur le matériel de reproduction des plantes ou sur les OGM. Il est donc important de fournir une compréhension scientifique solide des techniques de mutagénèse aléatoire et une analyse scientifique solide pour déterminer si la distinction entre in vitro et in vivo est scientifiquement justifiée ».
Le 19 mai 2021, l’EFSA a publié une première version du rapport, et l’a soumis à consultation publique sur son site internet jusqu’au 30 juin 2021. Voici la manière dont elle résume le contenu de ce projet de rapport :
« Les mutations sont des modifications du matériel génétique qui peuvent être transmises aux générations suivantes. Les mutations apparaissent spontanément dans la nature et sont l’une des forces motrices sous-jacentes de l’évolution. Chez les plantes, la mutagenèse in vivo et in vitro repose sur l’application d’agents mutagènes physiques et chimiques pour augmenter la fréquence des mutations et accélérer ainsi la sélection de variétés présentant des caractéristiques agronomiques importantes. […] Le groupe scientifique sur les OGM conclut que la plupart des techniques de mutagenèse physique et chimique ont été appliquées à la fois in vivo et in vitro ; le processus de mutation et les mécanismes de réparation agissent au niveau cellulaire, en grande partie indépendamment du contexte tissulaire ou de l’environnement extracellulaire, et il n’y a donc aucune différence selon que le mutagène est appliqué in vivo ou in vitro ; et le type de mutations induites par un mutagène spécifique devrait être le même, que ce mutagène soit appliqué in vivo ou in vitro. En effet, la même mutation et le même caractère dérivé dans une espèce végétale donnée peuvent être obtenus par mutagenèse aléatoire in vivo ou in vitro et les mutants qui en résultent ne peuvent être distingués les uns des autres. »
Suite à la phase actuelle de consultation publique, l’EFSA publiera son rapport définitif pour le mois de septembre 2021 en principe.
L’argumentaire de l’EFSA est celui du lobbying de l’industrie semencière. Il est fortement contesté par la Coordination européenne Via Campesina : pour un éclairage plus précis sur les distinctions entre mutagenèse aléatoire in vitro et les autres techniques de mutagenèse aléatoire in vivo, voir le document de travail d’ECVC du 26 mai 2021 ICI.
Lien vers le projet de rapport et vers la page internet de l’EFSA dédié à la consultation publique ICI