Niveau juridique : Union européenne
En 2013, un brevet a été délivré par l’Office européen des brevets (OEB) aux sociétés Heineken et Carlsberg, leur conférant un droit exclusif de 20 ans sur l’utilisation d’un orge génétiquement modifié par mutagenèse, mais aussi sur son brassage et sur la commercialisation de la bière ainsi obtenue. Force est de constater que ces revendications sont excessivement larges : le monopole conféré aux deux sociétés couvre tant le procédé de mutation du gène de l’orge, que les plantes elles-mêmes, que le malt, le moût et les boissons préparés à partir de cet orge, soit toute la chaîne du laboratoire à la choppe, en passant par le champ.
L’objectif de Heineken et Carlsberg est d’améliorer le « profil gustatif » de leurs bières et de réduire les apports d’énergie thermique nécessaires à leur production, grâce à un faible niveau en sulfure de diméthyle dans le grain d’orge.
Ce brevet, n°EP2373154 a fait l’objet d’un recours en opposition déposé en 2017 par des organisations militantes du bassin germanique (notamment Arche Noah et Pro Specie Rara). Le 9 juin 2021, il a pourtant été maintenu en l’état par la Chambre des recours techniques n°3.3.04 de l’OEB, qui considère qu’elle a simplement appliqué la jurisprudence de la Grande chambre des recours de l’OEB, notamment son avis G 3/19 (« Pepper ») du 14 mai 2020. Certes, dans cet avis, la Grande chambre a affirmé que les plantes issues exclusivement de procédés essentiellement biologiques (croisement, sélection, même avec utilisation de marqueurs moléculaires) ne sont pas brevetables. En principe donc, le brevet déposé par Heineken et Carlsberg est contraire au droit appliqué par l’OEB. Mais la décision Pepper indique aussi expressément qu’elle n’a pas vocation à s’appliquer de façon rétroactive : ainsi les brevets délivrés ou les demandes de brevets déposées avant le 1er juillet 2017 ne sont pas soumis à cette règle. Le brevet n°EP2373154 ayant été délivré à Heineken et Carlsberg avant cette date, il reste donc bien valide.
Lien vers le communiqué de presse de l’OEB ICI.
Voir aussi ICI un article du magazine Reporterre sur le sujet.