Niveau juridique : France
Texte du communiqué :
« Ce mercredi 10 juillet, l’EFSA publiait son opinion sur les critères d’équivalence entre nouveaux OGM et plantes conventionnelles, en lien avec la proposition de dérégulation des plantes issues des nouvelles techniques génomiques portée par la Commission européenne. Mandatée pour répondre à l’avis de l’Anses sur le sujet, publié en décembre 2023, l’EFSA en ignore les principaux enjeux et fait l’impasse sur l’essentiel.
L’EFSA a publié ce mercredi 10 juillet son opinion sur l’avis de l’Anses du 22 décembre 2023, concernant l’annexe 1 de la proposition de la Commission européenne sur la dérégulation des plantes obtenues à partir de nouvelles techniques génomiques (NTG). L’autorité sanitaire européenne conclut que les nouveaux OGM peuvent être considérés comme équivalents à des plantes conventionnelles s’ils correspondent aux critères retenus par la Commission, omettant les enjeux soulevés par l’avis très critique de l’agence sanitaire française.
« Dans son avis, l’EFSA fait complètement l’impasse sur les arguments formulés par l’Anses – qui remettent pourtant en cause les fondements de cette proposition de réglementation – et occulte totalement les risques des nouveaux OGM, qui ne seront pas évalués si le projet de règlement est adopté. L’agence, par cette réponse expédiée en 4 pages, donne ainsi son aval à la Commission européenne, en reprenant les arguments de cette dernière sans y apporter de regard critique et d’analyse scientifique », dénonce Charlotte Labauge, chargée de campagne à POLLINIS.
La Commission propose de considérer comme équivalente à une plante conventionnelle une plante qui aurait subi jusqu’à 20 modifications, parmi 5 types de modifications possibles, dont, entre autres, une substitution ou insertion de 20 nucléotides au maximum (soit 400 mutations possibles) et des délétions de taille illimitée. Cette catégorisation concernerait 94% des plantes issues de NTG en cours de développement et potentiellement commercialisables [1], et leur permettrait donc d’entrer sur le marché sans aucune évaluation des risques.
L’Anses a émis un avis très clair contre ces critères d’équivalence : « il n’y a pas de fondement scientifique sous-tendant une équivalence de type de caractères entre deux catégories de plantes sur la base d’un contenu équivalent en variations ou modifications génétiques qui seraient uniquement définies par leur type, leur taille et leur nombre ».
L’agence nationale sanitaire ajoutait que les risques des NTG ne sauraient être déterminés par un nombre de modifications génétiques : « La proposition d’un seuil maximal de modifications génétiques acceptables n’est pas scientifiquement fondée en termes de risques : le risque associé n’est pas directement proportionnel à un nombre de modifications quelles qu’elles soient ».
L’EFSA, qui avait pourtant été mandatée par le Parlement européen pour répondre à l’Anses, ne se prononce pas réellement sur la pertinence des critères choisis par la Commission pour déterminer une équivalence (nombre, taille et type de modifications) et l’importance d’adopter une approche plus complète. Elle construit son avis sur l’idée que de telles modifications peuvent aussi « être le résultat de mutations spontanées ou de mutagenèse aléatoire ». Un argument déjà énoncé dans le document technique de la Commission européenne et qui faisait justement l’objet de critiques de l’Anses.
L’autorité européenne de sécurité des aliments élude par ailleurs la question des risques, indiquant que « ces critères d’équivalence ne sont pas destinés à déterminer un niveau de risque mais à permettre certaines plantes NTG d’être classifiées comme équivalentes aux plantes issues de la sélection conventionnelle ». Pourtant, une classification des plantes NTG dans la catégorie 1 les exempte justement de toute évaluation des risques, puisque cela mène à les considérer comme équivalentes aux plantes conventionnelles. Il y a donc un lien direct entre les critères d’équivalence et les risques, que l’EFSA refuse d’admettre.
L’opinion de l’EFSA est publiée plusieurs mois après le second avis de l’Anses qui met en lumière des risques des nouveaux OGM – sur lequel l’EFSA ne s’est pas prononcée, n’ayant pas été mandatée pour le faire –, et après que le Parlement européen a déjà adopté le projet de réglementation de la Commission européenne. Alors que ce texte fait encore l’objet de tractations entre les États membres au Conseil de l’Union européenne, POLLINIS demande à la France de le rejeter.
[1] Bohle F, Schneider R, Mundorf J, Zühl L, Simon S and Engelhard M (2024) Where does the EU-path on new genomic techniques lead us?. Front. Genome Ed. 6:1377117. https://doi.org/10.3389/fgeed.2024.1377117 »
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