Niveau juridique : France
EDIT du 29 février 2024: Le texte a été retiré par son auteure le 20 février 2024
Le 24 janvier 2024, une cinquantaine de député.e.s de différents bords politiques ont déposé une proposition de résolution européenne relative à la proposition de règlement présentée par la Commission européenne sur les nouvelles techniques génomiques. Comme le montre l’exposé des motifs, ces député.e.s souhaitent réaffirmer que les NTG sont des OGM. Iels prennent toutefois bien le soin de préciser que « notre position ne s’apparente aucunement à aller à l’encontre de la recherche scientifique. Les NTG pourraient être une opportunité d’améliorer notre souveraineté alimentaire et être complémentaires d’une transition vers un modèle agricole plus durable. Cependant, en l’état actuel, une telle dérégulation, sans garde‑fous pour les États membres, est en totale incohérence avec les objectifs d’alimentation durable, de sécurité alimentaire et d’information des consommateurs qui sont au cœur de la transition alimentaire de demain. La présente résolution vise donc à positionner l’Assemblée nationale en faveur du maintien de la réglementation OGM actuelle. ».
Dans leur critique, les élu.e.s pointent tout particulièrement le fait que la proposition repose sur une analyse scientifique infondée (reprenant à leur compte l’avis de l’ANSES du 21 décembre 2023), engendre « des risques sanitaires et environnementaux non négligeables », créé « une nouvelle dépendance pour nos agriculteurs » (en raison des brevets sur ces techniques), constitue « une atteinte au droit à l’information » des consommateurices en raison de l’absence d’étiquetage des produits NTG, présente « un véritable risque pour la filière bio » et signe « une dérégulation sans possiblité d’opt-out national »(alors même que les gouvernements français se sont toujours opposés à la cuture d’OGM sur le territoire national).
Texte de la résolution :
« L’Assemblée nationale, (…)
Considérant que la validité scientifique de la proposition de la Commission est contestée par plusieurs agences nationales de protection de l’environnement, notamment sur la justification des critères d’équivalence ;
Considérant que selon plusieurs études scientifiques, les nouvelles techniques génomiques peuvent causer des effets collatéraux sur l’ADN hors des zones spécifiquement ciblées, et que la proposition de la Commission ne prévoit pas d’évaluer les possibles effets négatifs de ces modifications non intentionnelles ;
Considérant que la dérégulation proposée pourrait porter atteinte aux plus de 60 000 fermes engagées en bio en France du fait des « flux de gènes » entre cultures qui s’opèrent notamment par la pollinisation et qui auront pour conséquence que la filière bio française ne pourra garantir une agriculture sans organismes génétiquement modifiés ;
Considérant que l’absence d’une « clause de sauvegarde » ne permette plus à un État‑membre d’éventuellement revenir sur l’autorisation de culture ou de commercialisation d’une variété développée à partir de nouvelles techniques génomiques ;
Considérant que l’impact des nouveaux organismes génétiquement modifiés sur les pollinisateurs, la biodiversité et les écosystèmes est aujourd’hui largement méconnu en raison du nombre restreint d’études scientifiques indépendantes qui leur est consacré et du manque de financement pour ces dernières ;
Considérant que le modèle proposé par la Commission amplifie le brevetage du vivant, la privatisation de l’usage des plantes et l’accaparement des semences par quelques multinationales de l’agrochimie au détriment de nos agriculteurs et de notre souveraineté nationale ;
Considérant que le droit à l’information, garanti dans les traités européens, n’est pas respecté car il deviendra impossible pour un citoyen de savoir s’il consomme un produit contenant des « nouveaux organismes génétiquement modifiés » ou non ;
Considérant que la première génération d’organismes génétiquement modifiés n’a pas tenu ses promesses et n’a pas permis de réduire l’utilisation d’herbicides et de pesticides sur les surfaces cultivées ;
Considérant que des demandes d’autorisation pour des tests en plein‑champ de cultures nouvelles techniques génomiques ont déjà été déposées dans plusieurs pays européens ;
Considérant que toute nouvelle technologie doit faire l’objet de contrôle accru en amont de son autorisation, notamment pour évaluer les possibles risques sanitaires, écologiques et sociaux‑économiques ;
Considérant que la France avait formulé, le 11 décembre dernier lors d’une discussion au Conseil européen, une « réserve », afin que soient prises en compte les conclusions de l’Agence nationale de sécurité sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement et du travail sur la validité scientifique des critères d’équivalence ;
1. Enjoint la Commission européenne à revoir sa proposition de règlement pour y inclure une évaluation complète des risques des plantes nouvelles techniques génomiques ;
2. Invite le Gouvernement à intervenir auprès des États membres de l’Union européenne et de la Commission européenne afin qu’une clause de sauvegarde soit ajoutée au texte ;
3. Est favorable au maintien de la réglementation sur les organismes génétiquement modifiés actuelle pour les nouvelles techniques génomiques afin de garantir que le principe de précaution soit bien appliqué dans l’ensemble de l’Union européenne et qu’aucune variété d’organismes génétiquement modifiés ne puisse être commercialisée ou cultivée sans s’être assuré en amont de son impact positif sur la durabilité des écosystèmes et sur la santé des citoyens. Cette vigilance doit être conservée au‑delà de la mise sur le marché et permettre, le cas échéant, le retrait de plantes qui se révéleraient en contradiction avec l’impératif de sécurité alimentaire et environnementale. »
Lien vers la proposition de résolution ICI
Lien vers le dossier législatif ICI
EDIT du 29 février 2024: Le texte a été retiré par son auteure le 20 février 2024