Niveau juridique : Union européenne
Le 18 octobre, les scientifiques de l’EFSA (l’agence européenne pour la sécurité alimentaire) ont proposé six critères pour l’évaluation des risques associés à des plantes produites à l’aide des techniques génomiques de mutagenèse dirigée, cisgenèse et intragenèse. Cet avis scientifique avait été sollicité par la Commission européenne dans le cadre de ses réflexions autour des plantes obtenues par mutagénèse ciblée et par cisgénèse.
L’avis de l’EFSA peut être téléchargé ICI
L’EFSA a profité de cette occasion pour publier sur son site une FAQ sur le sujet.
Contenu de l’article sur le site de l’EFSA :
« 1) La mutagénèse dirigée, la cisgénèse et l’intragénèse, c’est quoi ?
Ce sont des techniques de génie génétique, c’est-à-dire des processus qui modifient la structure génétique d’un organisme en modifiant, en supprimant ou en introduisant de l’ADN.
La mutagénèse dirigée est un terme générique utilisé pour décrire des techniques qui induisent une ou des mutations spécifiques dans des emplacements ciblés du génome. Les changements se produisent sans insertion de matériel génétique.
La cisgénèse fait référence à la modification du matériel génétique d’un organisme avec une séquence d’ADN de la même espèce ou d’une espèce étroitement apparentée. La nouvelle séquence contient une copie exacte de la séquence déjà présente dans la réserve génétique des phytotechniciens ; ce réservoir constitue l’ensemble de toutes les informations génétiques pour une espèce donnée disponible pour une utilisation par les sélectionneurs.
L’intragénèse fait référence à la modification du matériel génétique d’un organisme à l’aide d’une combinaison de différentes séquences de la même espèce ou d’une espèce étroitement apparentée. La nouvelle séquence contient un copie réorganisée de séquences déjà présentes dans le réservoir génétique des sélectionneurs.
En quoi les plantes produites grâce à ces nouvelles techniques génomiques sont-elles différentes des plantes produites par les techniques de génie génétique établies ou par les techniques de sélection traditionnelle ?
Certaines plantes produites avec ces nouvelles techniques génomiques peuvent ne présenter que des changements mineurs susceptibles de se produire également dans la nature ou lors des procédés de sélection conventionnels. D’autres plantes peuvent en revanche présenter des modifications multiples et étendues similaires à celles des plantes produites par des techniques établies de modification génétique utilisées au cours des deux dernières décennies.
2) Quels critères les experts proposent-ils d’utiliser pour évaluer les risques liés à des plantes produites par mutagénèse dirigée, cisgénèse ou intragénèse ?
Les critères proposés par les scientifiques de l’EFSA sont exposés dans une déclaration de l’EFSA. Les quatre premiers des six critères portent sur la caractérisation moléculaire de la modification génétique introduite dans la plante réceptrice. Ils évaluent :
si une séquence d’ADN étrangère (« exogène ») est présente
si oui, si la séquence provient du réservoir génétique des sélectionneurs
comment la séquence a été intégrée, par exemple si elle est aléatoire ou dirigée
si un gène de la plante hôte a été « interrompu » (scindé) par la séquence nouvellement introduite
Les critères 1 à 4 sont conçus pour établir si des séquences cisgéniques ou intragéniques ont modifié les gènes de la plante hôte. Si ce n’est pas le cas, ou si aucun risque n’est identifié lorsqu’un gène étranger a été affecté, deux autres critères s’appliquent :
La plante modifiée a-t-elle un historique d’utilisation ?
Si ce n’est pas le cas, la structure et la fonction des versions modifiées de la séquence d’ADN ("allèle") doivent être soigneusement évaluées.
Ces deux derniers critères s’appliquent également aux plantes produites par mutagénèse dirigée.
3) Qu’entend-on par « historique d’utilisation » et comment peut-il être évalué ?
L’évaluation de l’historique d’utilisation doit constituer un volet important de l’évaluation des risques comparés des plantes cisgéniques, intragéniques ou à mutagenèse dirigée car les versions d’ADN nouvellement modifiées (« allèle ») peuvent déjà être présentes dans la nature. Ce concept est bien établi en ce qui concerne l’évaluation des OGM développés avant 2001. La démonstration d’un historique d’utilisation repose sur la preuve qu’une partie ou la totalité d’une plante a déjà été consommée dans l’alimentation (denrées alimentaires et/ou aliments pour animaux et produits dérivés) pendant une durée considérable, sans preuve d’effets nocifs pour le consommateur et que l’exposition due à une nouvelle utilisation se situera dans la fourchette de l’exposition observée au cours de l’utilisation « historique ». Des approches similaires sont utilisées pour évaluer les risques environnementaux.
Lorsque l’historique d’utilisation de la séquence d’ADN nouvellement modifiée (allèle) ne peut être suffisamment démontré, sa structure et sa fonction doivent être soigneusement évaluées (étape 6 des critères proposés).
4) La déclaration aborde-t-elle la question des effets non ciblés ?
Les effets non ciblés sont des mutations involontaires introduites dans des emplacements du génome autres que l’emplacement prévu. En ce qui concerne les plantes dans lesquelles la séquence d’ADN nouvellement modifiée est dirigée avec succès, il y aura des cas où le potentiel d’effets non intentionnels, tels que des effets non ciblés, est considérablement réduit par rapport à des insertions aléatoires ou à une sélection conventionnelle. Lorsque cela se produit, les exigences en matière de données pour l’évaluation des risques peuvent être réduites au cas par cas.
5) Pourquoi la Commission européenne a-t-elle demandé cet avis scientifique à l’EFSA ?
La Commission nous a demandé d’étudier les conclusions des avis scientifiques et des documents d’orientation antérieurs de l’EFSA dans ce domaine et de proposer des critères pertinents à prendre en compte lors de l’évaluation des risques potentiels liés à des plantes produites à l’aide de ces nouvelles techniques génomiques. Les documents scientifiques examinés couvrent l’évaluation des plantes génétiquement modifiées, l’évaluation des plantes développées par cisgénèse, intragénèse, mutagénèse dirigée ou biologie de synthèse, ainsi que l’évaluation de l’allergénicité et de la sécurité des protéines des denrées alimentaires et des aliments pour animaux issus de la biotechnologie.
Les travaux de l’EFSA étayeront l’initiative politique en cours de la Commission européenne dans le domaine des nouvelles techniques génomiques. Voir le site internet de la Commission pour en savoir plus.
6) Quel est le rôle de l’EFSA dans le domaine des nouvelles techniques génomiques ?
Le travail de l’EFSA consiste à évaluer la sécurité des aliments pour les humains, les animaux et l’environnement. Notre déclaration sur les critères d’évaluation des risques liés aux plantes produites par mutagénèse dirigée, cisgénèse et intragénèse synthétise un ensemble de travaux qui constituent la première étape d’établissement d’un cadre scientifique robuste pour l’évaluation des risques de ces techniques pour l’alimentation humaine et animale et pour l’environnement, au cas par cas. Elle comprend la liste des cas où les méthodologies d’évaluation des risques existantes peuvent être appliquées et met en évidence les lacunes présentes dans les approches actuelles ainsi que les données nécessaires pour combler ces lacunes. Il n’appartient pas à l’EFSA de se prononcer sur la façon dont l’agriculture européenne devrait se développer ou sur la nécessité d’utiliser de nouvelles technologies pour atteindre des objectifs politiques tels que des systèmes alimentaires plus durables.
L’EFSA continuera à fournir une assistance technique et des conseils scientifiques pour soutenir les gestionnaires du risque dans le domaine du génie génétique afin de garantir la sécurité des aliments pour les consommateurs de l’UE.
7) Les citoyens de l’UE sont-ils conscients ou préoccupés par l’utilisation de nouvelles techniques génomiques dans la production alimentaire ?
Deux enquêtes récentes menées par l’EFSA – un sondage éclair en 2021 et l’Eurobaromètre 2022 sur la sécurité des aliments – a révélé une faible connaissance des nouvelles techniques génomiques parmi les citoyens de l’UE. Les résultats de l’Eurobaromètre indiquent que l’utilisation de nouvelles biotechnologies dans la production alimentaire ne constitue pas une préoccupation fréquemment mentionnée par les citoyens et seuls 8 % des personnes qui ont connaissance de cette question la citent également comme étant l’une de leurs cinq préoccupations principales en matière de sécurité des aliments. Cependant, la question « Quels sont les risques potentiels ? », présentée dans le sondage éclair, révèle un manque d’information important chez les citoyens ; deux tiers (69 %) d’entre eux environ souhaitent en savoir plus à ce sujet.
8) Comment puis-je en savoir plus sur les travaux de l’EFSA en matière de nouvelles techniques génomiques ?
L’EFSA organisera une rencontre publique avec les parties prenantes intéressées par ce sujet le 12 décembre 2022. Lors de cet événement, nous inviterons les participants à prendre part à une table ronde interactive qui portera exclusivement sur l’évaluation des risques et les aspects scientifiques de ces nouvelles techniques génomiques. »
Voir aussi le Dossier : Nouvelles avancées en biotechnologie – Contexte et liens vers nos productions scientifiques antérieures.
Lien vers la page sur le site de l’EFSA ICI