Niveau juridique : France
Dans le cadre des travaux réalisés par la commission pour établir son rapport sur la mission mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » du projet de loi de finance pour 2022, une audition de Julien Denormandie, ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation, a eu lieu le 23 novembre 2021. La question des nouveaux OGM a été abordée, dans des termes qui laissent peu de doute sur la position de la commission (ni de celle du ministre, d’ailleurs !).
Extraits choisis - passages en gras soulignés par nos soins :
Mme Dominique Estrosi Sassone, vice-présidente : «(…) La deuxième question est liée puisqu’elle porte sur le Varenne de l’eau. Les deuxième et troisième thématiques portent sur l’eau et sur la résilience de notre agriculture. Ce sont des sujets essentiels pour relever le défi du changement climatique. Cela passe par l’irrigation, la France étant à la traîne par rapport aux autres pays européens; cela passe par des innovations culturales, des pratiques nouvelles, des technologies de rupture; cela passe aussi par la génétique. Or ces questions ne sont pas anodines dans un climat où des délits d’intrusion dans des exploitations se multiplient contre toute innovation permettant, justement, de renforcer la résilience de notre agriculture au changement climatique. Je pense bien sûr à l’éventrement d’une bassine d’eau à Mauzé-sur-le-Mignon. Je pense également au fauchage de semences de tournesols issues de variétés rendues tolérantes aux herbicides (VRTH) de la société RAGT dans l’Aveyron, après le fauchage d’autres semences à Ambeyrac quelques semaines auparavant. Nous aurons beau jeu de promouvoir des solutions concrètes pour l’innovation; si elles sont détruites systématiquement par des casseurs, nous ne progresserons pas.
L’agriculture de demain, celle qui résistera au changement climatique et participera à une meilleure préservation de l’environnement, repose sur plus d’innovation et de progrès, et non sur un retour à l’agriculture d’hier. Que les prétendus défenseurs exclusifs d’une agroécologie détruisent les pistes les plus prometteuses pour la préservation de notre agriculture et de notre écologie n’est pas le moindre des paradoxes. En tout état de cause, ces actes ne peuvent rester sans réponse. Et c’est sans parler des intrusions dans les établissements d’élevage créant un climat anxiogène au travail de nos éleveurs.Le Gouvernement en a-t-il assez fait pour lutter contre ces atteintes aux exploitants agricoles ? Qu’entend-il faire sur le sujet des retenues d’eau ? Comment sortir du contentieux européen dans lequel nous sommes englués sur la mutagenèse ? Quelle sera votre position lors de la présidence française de l’Union européenne sur ces sujets ? (…) »
M.Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. « (…) Le secteur agricole est l’un des plus compliqués, car les agriculteurs sont des entrepreneurs du vivant. (…) Il me semble aussi que nous devons écrire un nouveau chapitre de notre histoire agricole - qui est déjà en cours. Une histoire qui a été marquée d’abord par la révolution du machinisme, après la Seconde Guerre mondiale, puis par la révolution de l’agrochimie, dans la seconde partie du XXe siècle. Depuis lors, la seule vision collégialement admise et dans laquelle nous nous complaisons depuis des décennies est celle de l’agroécologie.
Or l’immense inconvénient de cette vision, c’est que l’agriculture doit répondre aujourd’hui à trois objectifs : produire - et la crise des engrais que nous vivons actuellement montre à quel point nous sommes peut-être à l’aube d’un problème majeur à l’échelle internationale -, protéger l’environnement et améliorer la nutrition.
Or si votre vision politique n’est qu’une transition parmi toutes, vous faites l’impasse sur les autres objectifs, que sont la nutrition et la production. Pour moi, ce nouveau chapitre de l’histoire agricole, c’est cette troisième révolution agricole, que vous avez mentionnée, madame la présidente, et qui est tournée vers le numérique, l’agro-robotique, la génétique, le biocontrôle et qui permet de concilier les trois objectifs sans en amenuiser un par rapport aux autres. Telle est la politique que nous portons qui consiste, non pas à ouvrir le tiroir-caisse, mais à investir dans quelque chose de structurant pour notre agriculture et notre souveraineté. (…)
S’agissant des NBT (New Breeding Technologies),j’y crois beaucoup. Fidèle à la célèbre phrase de Rabelais: «Science sans conscience n’est que ruine de l’âme», je crois profondément que le progrès, c’est de croire en cette science, et notamment dans la sélection variétale. Cette sélection variétale accélérée que sont les NBT est extrêmement bénéfique. Évidemment, il faut le faire avec conscience, c’est-à-dire que les NBT doivent être utilisés pour obtenir des plantes résistantes aux risques sanitaires ou climatiques et non aux herbicides.Conformément à la position de la France, la Commission européenne nous a présenté un projet de revue de positionnement des NBT dans son cadre juridique lié aux organismes génétiquement modifiés (OGM). Nous devons avancer sur ce sujet. »
Lien vers le rapport ICI