Sénat Question écrite n° 07467 de M. Roland Courteau (Aude - SOC) publiée dans le JO Sénat du 18/07/2013

Niveau juridique : France

Question écrite publiée dans le JO Sénat du 18/07/2013 - page 2082

M. Roland Courteau expose à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt que les instances européennes devraient se prononcer sur une proposition de réforme de la réglementation des semences, visant à soumettre à certificat d’obtention végétale les variétés et plantes brevetées.

Il lui précise que les semences de variétés paysannes hétérogènes sélectionnées et multipliées à des fins agricoles ne pourraient alors plus être commercialisées puisque l’utilisation de toute semence contaminée par des gènes brevetés serait dès lors soumise au droit de propriété. La commercialisation des semences serait, de ce fait, susceptible de ne concerner que les seules variétés hétérogènes protégées par un certificat d’obtention végétale et d’exclure, dès lors, les semences biologiques, locales ou traditionnelles issues d’une agriculture paysanne séculaire.

Il lui indique que le réseau« semences paysannes » s’alarme et demande l’adoption d’un règlement européen qui reconnaisse et protège le droit des paysans et des jardiniers d’échanger librement leurs semences. Ces échanges seraient, en effet, indispensables aux sélections paysannes qui garantissent le renouvellement constant de la biodiversité cultivée. Ainsi, seules ces sélections pourraient permettre l’adaptation locale des plantes à l’extrême diversité des terroirs et à la variabilité croissante des climats, sans recours exponentiel aux engrais et aux pesticides chimiques.

Il lui demande de bien vouloir lui faire connaître son sentiment par rapport à ces propositions et les initiatives susceptibles d’être engagées.

 

Réponse du Ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, publiée dans le JO Sénat du 10/10/2013 - page 2961

La question de la production et commercialisation de matériels de reproduction de végétaux, issus notamment d’un processus de sélection participative et ne rentrant pas dans la définition réglementaire de la variété, est une problématique qui a été prise en compte dans le cadre de deux axes de travail du plan d’action semences et agriculture durable porté par le ministère chargé de l’agriculture. Le sujet revêt en effet deux aspects qu’il convient de distinguer.

Le premier point couvre la question des conditions d’accès de ces matériels au marché. Dans la mesure où ces matériels ne répondent pas à la définition réglementaire de la variété, en l’état actuel de la réglementation, ils ne peuvent pas être inscrits au catalogue officiel des espèces et variétés de plantes cultivées. Dans le but de trouver une issue à cette situation, les services du ministère de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt mènent dans le cadre de la mise en œuvre du plan semences et agriculture durable un travail de consultation des parties prenantes pour identifier les leviers réglementaires pouvant contribuer à donner un accès formel de ces matériels au marché. Ces travaux ont notamment conduit la France à porter cette réflexion auprès de la Commission européenne qui a, elle aussi, avec cet appui, engagé des travaux équivalents. L’enjeu de cette initiative est de permettre un accès au marché à ces matériels sans toutefois fragiliser le régime général de commercialisation des variétés, des semences et des plants, qui donne toute satisfaction à la très grande majorité des utilisateurs tout en constituant un levier puissant de mise en œuvre d’une agriculture durable et agro-écologique.

Le second point qui est soulevé porte sur la question de la présence fortuite d’éléments brevetés dans des semences produites par les agriculteurs notamment issues de la sélection participative. Ce point constitue effectivement un risque d’insécurité juridique pour les agriculteurs produisant et exploitant de tels matériels. Dans ce contexte, il convient de créer des conditions qui permettent à tout utilisateur d’une variété, qu’il soit agriculteur ou sélectionneur, de disposer d’une information transparente quant aux régimes de propriété intellectuelle rattachés à cette variété. Pour répondre à cette question, une base de données déclarative a été mise en place par la profession. Elle centralise les informations relatives aux brevets et certificats d’obtention végétale rattachées aux variétés. Enfin, ce risque a également été débattu au sein du groupe de travail biotechnologies végétales et propriété industrielle du Comité économique éthique et social (CEES) du Haut conseil des biotechnologies (HCB). Dans son rapport publié en juin 2013, le HCB souligne que le risque juridique de contrefaçon de brevet existe effectivement pour les agriculteurs réalisant des sélections sur leur propres parcelles. Néanmoins aucune action en contrefaçon de brevet intentée contre des agriculteurs en Europe n’a été portée à notre connaissance.

 

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