Niveau juridique : France
Texte de la question :
« M. Loïc Prud’homme interroge M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation sur l’orientation de la recherche agronomique publique, dont il a la charge partagée avec Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. Les images récentes d’animaux maltraités d’un centre de recherche privé ont ému largement sur les réseaux sociaux au sujet de la maltraitance animale. Dans le même temps, un reportage télévisé sur le verrouillage de la propriété des ressources génétiques végétales par des firmes pointe les enjeux de biodiversité et d’autonomie alimentaire. Au-delà de la légitime émotion provoquée par ces actualités, il est nécessaire de s’interroger sur la finalité de la recherche, en particulier de la recherche agronomique française. Ces images sont les avatars d’une agriculture et une agronomie tournées vers le productivisme le plus cupide et de la recherche scientifique associée. Le modèle agricole français date de 70 ans et sa trajectoire n’a été modifiée qu’à la marge. Il est aujourd’hui obsolète. Quelle est la nécessité actuelle de poursuivre des recherches (publiques ou privées) pour « améliorer » ce modèle productiviste ? Il faut faire l’exact contraire, privilégier les races animales locales et variétés végétales anciennes, la diversité génétique, adaptées aux terroirs. À cette condition, ces horreurs s’arrêteront. Que fait l’INRA pour accompagner ce virage radical du modèle agricole ? Quels moyens ont été investis dans les conservatoires génétiques végétaux et animaux publics ? Combien ont été supprimés et leurs ressources perdues depuis 10 ans ? Quels moyens sont affectés à la recherche sur l’autonomie alimentaire, la relocalisation indispensable des productions et leur accompagnement vers une sobriété complète en intrants de synthèse ? Il souhaite savoir s’il entend rédiger rapidement une nouvelle lettre de mission au PDG de l’INRA afin que ces enjeux soient massivement pris en compte par la recherche publique. »
Texte de la réponse :
« L’institut national de la recherche agricole (INRA) accompagne, depuis sa création, les transformations des systèmes agricoles et alimentaires. Aujourd’hui, dans son document d’orientation INRA-2025, l’INRA affiche une politique scientifique ambitieuse pour une agriculture compétitive et respectueuse de l’environnement. Trois chantiers interdisciplinaires transversaux sont définis sur l’agro-écologie, le renouveau de l’élevage et la compréhension du nexus santé-alimentation-agriculture-environnement. Par ailleurs, dans le cadre de son Contrat d’Objectifs et de Performance 2017-2021 souscrit avec l’État, l’INRA s’est engagé à répondre au projet agro-écologique pour la France. Cet engagement contribue à l’acquisition de connaissances scientifiques et au développement de systèmes de production plus respectueux de l’environnement et s’appuyant sur la diversité des écosystèmes. L’agroécologie fournit ainsi le cadre conceptuel des travaux de recherche conduits par l’institut au service d’une performance productive, économique, sanitaire, sociétale et environnementale de l’agriculture. Ces travaux de recherche contribuent en particulier à l’autonomie alimentaire, la relocalisation des productions et l’accompagnement vers une sobriété complète en intrants de synthèse. De plus, depuis 2019, l’INRA coordonne le programme prioritaire de recherche « Cultiver et protéger autrement » lancé par le ministère chargé de la recherche. Ce programme vise à développer les connaissances de rupture et à permettre le développement d’une agriculture performante et durable fondée sur la prophylaxie et l’agro-écologie. L’INRA est également associé à l’élaboration de la stratégie nationale sur les protéines végétales destiné notamment à faire évoluer les systèmes agricoles dans une logique de circularité et de bouclage des cycles de nutriments qui limite l’utilisation d’intrants fossiles. Des moyens publics sont consacrés dans les conservatoires génétiques végétaux et animaux, tels que le « CRB-Anim » soutenu par le programme d’investissements d’avenir (PIA1), ou les centres de ressources biologiques végétales (CRB) entretenus par l’INRA. Dans ce domaine, l’INRA coordonne l’infrastructure RARe dédiée à 32 CRB des plantes, des forêts, des animaux, des ressources environnementales et microbiennes. Les ressources conservées par les CRB constituent ainsi un patrimoine national et un atout pour la recherche ; elles sont destinées à répondre aux grands enjeux des connaissances du vivant, telles que la compréhension des dynamiques de la biodiversité, l’adaptation au changement climatique, l’alimentation, ou encore les services rendus par les écosystèmes. Depuis 10 ans, l’INRA n’a pas connu de suppression de conservatoires, ni de pertes de ressources. Dans ce cadre, le ministère chargé de l’agriculture ne prévoit pas de rédiger une nouvelle lettre de mission à court terme pour le président-directeur général de l’INRA, mais reste attentif à la prise en compte des préoccupations sociétales évoquées dans le cadre de la fusion entre l’INRA et l’institut national de recherche en sciences et technologies pour l’environnement et l’agriculture. Celle-ci prendra effet au 1er janvier 2020 pour créer une entité de premier rang mondial avec une ambition scientifique encore plus large sur la bioéconomie et les systèmes alimentaires, à développer à l’échelle globale comme à celle des territoires. »
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