Niveau juridique : France
Le 7 février, le Ministre de l’agriculture et de l’alimentation M. Didier Guillaume a répondu aux questions des députés concernant la mise en œuvre de la loi Agriculture et alimentation du 30 octobre 2018.
Dans le compte-rendu de la séance, qui a été publié, on notera la question de M. Loïc Prud’Homme et la réponse de M. le Ministre.
Extrait :
»M. Loïc Prud’homme. Il est urgent de changer de modèle, de changer de paradigme agricole. Pour cela, nos agriculteurs doivent avoir la main sur leurs semences, et ce aussi pour préserver un patrimoine génétique et une variabilité génétique, laquelle permet aux plantes de s’adapter aux changements en cours, en particulier de résister aux insectes ravageurs des cultures.
L’article 78 de la loi EGalim autorisait la vente de semences libres ou paysannes, alors qu’il était, jusqu’à présent, seulement possible de les donner. De nombreuses organisations paysannes et de défense de l’environnement se sont réjouies de cette disposition. Malheureusement, le Conseil constitutionnel a censuré cet article. Jusqu’ici réservée aux grands groupes semenciers, la vente aurait été ainsi permise à des associations comme Kokopelli ou le Réseau Semences Paysannes. Les géants des semences allaient perdre leur hégémonie sur ce gigantesque marché très lucratif. On en est finalement revenu à ce que des multinationales puissent déposer des brevets sur le vivant. Étant donné la situation de notre agriculture mais aussi la nécessité des changements à opérer, ce n’est pas acceptable.
Je vous interroge : comment en est-on arrivé là ? Est-ce la conséquence d’une légèreté de la part du Gouvernement dans la rédaction de l’article 78 ? Est-ce le fait de la pression exercée sur le ministère par des lobbys cherchant à servir leurs intérêts ? Mais la question importante est la suivante : que comptez-vous faire pour réparer cette erreur, afin que les paysans se voient, à nouveau, garanti le droit essentiel de disposer des semences, un droit essentiel aussi pour la préservation de la biodiversité et de la diversité génétique ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Didier Guillaume, ministre. Monsieur Prud’homme, votre question est très importante et je vous en remercie. Je vais essayer de vous répondre très clairement. Je comprends ce que vous dites, moi qui ai fait du département dont j’étais le président, le premier département bio de France, le premier département sans OGM, le premier département pour les circuits courts, le premier département d’agriculture paysanne, le premier département pour la transformation. Pour autant, je n’oppose pas les agricultures. Nous avons besoin d’une grande agriculture, qui produit et qui exporte, mais aussi d’une petite agriculture.
La transition agroécologique est indispensable. Je l’ai placée à nouveau au cœur du projet agricole. Je partage votre avis : il n’est pas question de remplacer une molécule par une autre. Si sortir du glyphosate c’était le remplacer par une autre molécule chimique, nous aurions raté notre objectif. Ce n’est donc pas dans cette direction qu’il faut aller. En même temps, comme le Président de la République l’avait dit dès le départ, je réaffirme ici, à l’Assemblée nationale, que nous ne laisserons aucune filière, aucun agriculteur sans solution.
Alors sénateur, j’étais très favorable à l’article 78 de la loi EGalim. C’est avec regret que j’ai constaté que la droite sénatoriale avait déposé un recours devant le Conseil constitutionnel contre ce texte, qui a abouti à l’invalidation de cet article, comme d’autres d’ailleurs. Je souhaite que, dans le cadre d’une niche parlementaire ou d’un prochain créneau, peut-être à l’occasion du projet de loi de finances pour 2020, nous puissions remettre ce sujet à l’ordre du jour. Il s’agit, en effet, d’une question importante, à laquelle la majorité est, comme vous, très attachée.
Les sujets sont peu nombreux sur lesquels nous pourrions, comme sur celui-ci, parvenir à l’unanimité. Je vous engage tous, dans cet hémicycle, à relancer cette dynamique. Le Gouvernement y sera favorable. »
Pour lire le compte-rendu intégral, voir ici.