Assemblée nationale : Rapport d’information déposé par la commission des affaires européennes sur la prévention des conflits d’intérêt dans l’Union européenne n° 4391 déposé le 18 janvier 2017

Niveau juridique : France

DEUXIÈME PARTIE : REPENSER LES RÈGLES DÉONTOLOGIQUES APPLICABLES AUX RESPONSABLES PUBLICS DE L’UNION

I. UN RISQUE DE CONFLITS D’INTÉRÊTS INSUFFISAMMENT MAITRISÉ

C. UN RISQUE DE CONFLITS D’INTÉRÊTS PARTICULIÈREMENT PRÉGNANT DANS LES DOMAINES OÙ L’EXPERTISE SCIENTIFIQUE PRIME

(…)

«  2. Un risque de conflit d’intérêts particulièrement important dans les agences européennes

a. Des difficultés soulevées à plusieurs reprises en ce qui concerne les agences européennes

Le risque de conflits d’intérêts s’est avéré particulièrement élevé dans certaines agences de l’Union chargées de tâches de régulation.

C’est notamment le cas de l’Agence européenne de sécurité des aliments (EFSA).

Ainsi, le 10 mai 2012, le Parlement européen a adopté une décision visant à ajourner la décharge budgétaire à octroyer à l’EFSA pour l’exécution de son budget pour l’exercice 2010, principalement pour des raisons de mauvaise gestion des conflits d’intérêts. Le Parlement avait en effet constaté « qu’en septembre 2010, la présidente du conseil d’administration de l’Autorité aurait entretenu des liens directs avec l’industrie alimentaire et aurait été l’un des membres du conseil de direction de l’Institut international des sciences de la vie ». Dans la même décision, le Parlement européen avait également indiqué qu’en mars 2010 une organisation non gouvernementale allemande s’était adressée au Médiateur européen car, selon elle, l’EFSA n’aurait pas géré correctement le « pantouflage » du chef de son unité dédiée aux organismes génétiquement modifiés, engagé par une entreprise spécialisée dans les biotechnologies. Le Médiateur avait conclu que « l’Autorité n’avait pas procédé à une évaluation minutieuse du conflit d’intérêts potentiel présumé » et avait appelé l’Autorité à « améliorer la façon dont elle appliquait ses règles et procédures dans de futurs cas de « pantouflage » ».

À la suite de ces critiques, le Parlement européen a invité la Cour des comptes européenne à « entreprendre une analyse globale des approches adoptées par les agences pour gérer les situations de conflits d’intérêts potentiels ». Après avoir réalisé un audit des politiques et des procédures de gestion des situations de conflit d’intérêts dans quatre agences : l’Agence européenne de la sécurité aérienne, l’Agence européenne des produits chimiques, l’Autorité européenne de sécurité des aliments, l’Agence européenne des médicaments, la Cour des comptes européenne a estimé dans son rapport publié le 11 octobre 2012 qu’« aucune des agences auditées ne gérait les situations de conflit d’intérêts de manière appropriée ».

Le 17 avril 2013, le Parlement a voté la décharge budgétaire de l’EFSA pour l’exercice 2011, tout en soulignant que l’Autorité ne gérait toujours pas correctement les situations de conflits d’intérêts, même si des mesures avaient été prises en la matière, et que l’Autorité avait notamment été critiquée pour son manque de transparence en ce qui concerne la publication des déclarations d’intérêts annuelles et l’absence de formation de son personnel en la matière.

Une enquête a par ailleurs été ouverte par la Médiatrice européenne le 29 août 2016 - suite à une plainte - sur d’éventuels conflits d’intérêts dans l’adoption par l’EFSA de son approche sur le « seuil de préoccupation toxicologique ».