Niveau juridique : France
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Question publiée dans le JO Sénat du 07/04/2016 - page 1374
M. Joël Labbé interroge Mme la ministre de l’environnement, de l’énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, à la suite de la démission récente d’un expert du comité scientifique (CS) du haut conseil des biotechnologies (HCB), suivie de la suspension, par huit organisations paysannes et de la société civile, de leur participation aux travaux du comité économique, éthique et social du même HCB :
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d’une part, sur le sujet ayant provoqué ces désaccords, à savoir les nouvelles techniques de production d’organismes génétiquement modifiés (OGM), « organismes modifiés d’une manière qui ne s’effectue pas naturellement par multiplication et/ou par recombinaison naturelle ». Ce sujet remet en évidence la question de la commercialisation et de la dissémination d’OGM dans l’environnement, avec ou sans évaluation, information du consommateur et suivi post-commercialisation ;
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d’autre part, sur les dysfonctionnements du haut conseil, révélés par cette démission et qui ne permettent pas l’expression de la pluralité des positions, alors même que c’est justement la spécificité revendiquée du HCB.
La mission du haut conseil des biotechnologies étant « d’éclairer le Gouvernement sur toutes questions intéressant les OGM ou toute autre biotechnologie », il est essentiel que les avis rendus reflètent la diversité des approches scientifiques, même lorsqu’elles sont divergentes.
Il lui demande d’abord s’il est possible de garantir le respect des procédures internes du haut conseil des biotechnologies :
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qui refuse la publication d’un avis divergent, portant sur des risques potentiels pour la santé et l’environnement, au motif d’un article de son règlement intérieur ne concernant que l’élaboration des avis de son CS et non les discussions sur des notes des groupes de travail. Cette discussion a, pourtant, été introduite par le président du CS, sans aucune indication sur le devenir de la note et par un appel aux membres du comité à faire « remonter ultérieurement leurs commentaires s’ils en ont, ou des souhaits de modifications ou d’amélioration, mais qu’ils ne soient pas discutés maintenant » ;
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qui transforme une simple discussion sur une note d’un groupe de travail, distribuée trois jours ouvrés auparavant, alors qu’elle répond à une question posée au CS trois ans plus tôt, dans la première étape d’un avis du CS.
Cette « première étape » propose déjà une conclusion définitive unilatérale et a été rendue publique comme un document validé par l’ensemble du CS.
Il lui demande ensuite comment la « deuxième étape » proposée en réaction à la démission de l’expert censuré pourrait remettre en cause cette conclusion et, enfin, comment ce « complément du premier avis » pourra être pris en compte par le Gouvernement qui doit donner son avis à la Commission européenne avant qu’il ne puisse être élaboré.
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REPONSE du Ministère de l’environnement, de l’énergie et de la mer, chargé des relations internationales sur le climat publiée dans le JO Sénat du 23/06/2016
Les nouvelles techniques de modification du génome constituent un sujet de préoccupation important. Les potentialités de ces techniques sont immenses mais les enjeux qui leur sont associés ne sont pas clairement cernés aujourd’hui. Qu’il s’agisse du domaine des procédures d’évaluation des risques, mais aussi de celui lié à la traçabilité et à la surveillance, ou encore de la propriété industrielle, leur encadrement réglementaire doit être décidé en garantissant que toutes les précautions nécessaires soient mises en oeuvre. C’est bien pour examiner l’ensemble de ces enjeux que la ministre chargée de l’environnement a saisi, conjointement avec le ministre de l’agriculture, le Haut conseil des biotechnologies qui doit maintenant travailler en vue d’apporter des conclusions éclairant les décisions qui devront être prises. L’état des lieux qui a fait l’objet des premières réflexions publiées par le Haut conseil des biotechnologies ouvre le débat. Il est ainsi fondamental que tous les avis, y compris minoritaires ou divergents, soient pris en compte et portés à la connaissance de tous. La position divergente du membre du comité scientifique a été entendue et sera publiée et prise en compte pour la finalisation des travaux du Haut conseil demandés par le Gouvernement. Dans le cadre de la récente saisine, le Haut conseil des biotechnologies aura à examiner l’ensemble des risques et des bénéfices apportés par cette nouvelle génération de techniques de modification du génome, et à traiter de tous les enjeux sanitaires, environnementaux, et socio-économiques impactés par l’éventuelle dissémination de ces produits. La contribution apportée par l’avis divergent exprimé constituera une composante à part entière de ce travail. Enfin, il convient de préciser que, au niveau européen, cette question est abordée sous un angle très juridique par la Commission européenne, à ce jour sans consultation des États membres. Cela peut se faire soit dans le cadre de la réglementation sur les OGM, soit dans le cadre général. La ministre chargée de l’environnement veillera à ce que les dispositions prises pour encadrer ces nouvelles techniques de modification du génome ne constituent pas un moyen de contourner les règles concernant les organismes génétiquement modifiés.