Niveau juridique : France
Question publiée au JO le : 11/08/2015 page : 6034
Réponse publiée au JO le : 05/01/2016 page : 44
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Texte de la question
M. Christophe Léonard attire l’attention de M. le ministre des affaires étrangères et du développement international sur la négociation en cours du traité de libre-échange transatlantique (TAFTA) et plus particulièrement sur la création de tribunaux privés qu’engendrerait le traité. Les négociations, menées dans le plus grand secret, pourraient, aux dires d’observateurs éclairés, permettre la création d’un mécanisme d’arbitrage qui offrirait la possibilité aux entreprises de poursuivre des États sur la base du traité. Ces tribunaux privés pourraient ainsi remettre en cause des décisions souveraines, de gouvernements démocratiquement élus, à la demande d’entreprises multinationales. Sans jurisprudence claire et sans hiérarchie dans le choix des juges, le risque dans ces tribunaux de conflit d’intérêt est grand, et peut mener à une instabilité politique. Par ailleurs, ce mécanisme, susceptible de menacer notre démocratie, est contesté par un nombre croissant de nos citoyens, comme en témoigne la récente consultation publique sur ces tribunaux organisée par la commission européenne et qui a recueilli 150 000 réponses, en très grande majorité critiques. C’est pourquoi il lui demande de préciser la position de la France vis-à-vis de ces tribunaux privés.
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Texte de la réponse
Le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et Etats (ou Investor-to-State Dispute Settlement – ISDS) peut faire obstacle au droit de la puissance publique à réglementer pour protéger la santé, la sécurité, les consommateurs, les travailleurs, l’environnement et la diversité culturelle, alors même que le maintien de ce droit est l’une des lignes rouges qui figurent dans le mandat de négociations donné par les Etats membres à la Commission européenne. La France n’a jamais été demandeuse de ce type de mécanisme dans le Partenariat commercial transatlantique et il est indispensable d’inventer un mécanisme neuf qui garantisse à la puissance publique la capacité de conduire des politiques publiques légitimes. La France a engagé une démarche commune sur ce sujet avec plusieurs pays européens, dont l’Allemagne. La Commission européenne a présenté en septembre sa proposition de mécanisme de protection des investissements pour le Partenariat commercial transatlantique, qui reprend la plupart des propositions françaises. La Commission prévoit notamment l’établissement d’une cour bilatérale des investissements, composée de juges hautement qualifiés. Pour éviter les conflits d’intérêt, ces juges auraient l’interdiction d’exercer en parallèle des fonctions de conseil dans d’autres procédures de règlement des conflits investisseurs-Etats. Cette cour serait par ailleurs dotée d’un mécanisme d’appel et d’annulation des décisions de première instance, à l’instar des procédures d’appel devant les cours nationales. Enfin, la Commission propose une clause « chapeau » qui stipule que les dispositions relatives à la protection des investisseurs ne pourront empêcher l’adoption de mesures destinées à protéger l’environnement, la santé publique, les normes sociales, les consommateurs ou encore la diversité culturelle, et que les investisseurs ne pourront se prévaloir de ces dispositions au seul motif que la législation a changé. Cette proposition, qui a reçu l’assentiment du Conseil de l’Union européenne, a été adressée aux négociateurs américains au mois de novembre. Ces derniers n’ont pas encore exprimé de position officielle à ce sujet.