Niveau juridique : France
Question publiée au JO le : 02/10/2012 page : 5294
Réponse publiée au JO le : 18/12/2012 page : 7545
Texte de la question
Mme Laurence Abeille interroge M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt sur la protection de la diversité des semences. La décision de la Cour de justice de l’Union européenne dans l’affaire Kokopelli contre Baumaux inquiète les défenseurs des semences traditionnelles. Dans un jugement du 12 juillet dernier, la Cour de justice européenne a condamné l’association Kokopelli pour concurrence déloyale, remettant en cause le fondement même de son activité. Selon cette décision, qui va à l’encontre de l’intérêt général, la « productivité agricole accrue » prévaut sur la préservation de la biodiversité. L’activité de l’association Kokopelli est de préserver la biodiversité semencière en distribuant des semences issues de l’agriculture biologique et biodynamique mais non inscrites au catalogue officiel des espèces et variétés végétales et également en conservant une collection unique de plus de 2200 variétés de plantes potagères, céréalières, médicinales, condimentaires et ornementales. Cette activité de préservation de la diversité génétique des plants et des variétés anciennes doit être défendue. Aussi elle lui demande ce qu’il compte faire en matière de révision de la législation en vigueur sur le commerce des semences.
Texte de la réponse
Le ministère chargé de l’agriculture assure le suivi des travaux en cours de révision de la réglementation européenne en matière de commercialisation des variétés, semences et plants. Ces travaux visent à simplifier et rénover la réglementation actuellement en vigueur, tout en préservant et réaffirmant les objectifs de qualité et de durabilité de notre agriculture. Dans ce cadre, l’arrêt du 12 juillet 2012 de la Cour de justice de l’Union européenne relatif à l’affaire C59-11 (Association Kokopelli) est un élément important à prendre en compte dans la construction de la future réglementation. Dans cet arrêt, la Cour réaffirme la légitimité et la proportionnalité de la réglementation européenne actuelle relative à la commercialisation des semences et des plants, et souligne le fait que la validité de cette réglementation n’est affectée ni par certains principes du droit de l’Union européenne, ni par les engagements pris par cette dernière aux termes du Traité international sur les ressources phytogénétiqques pour l’alimentation et l’agriculture (TIRPAA). Ainsi, la réglementation actuelle ne viole ni les principes d’égalité de traitement, de libre exercice d’une activité économique et de libre circulation des marchandises, ni les engagements pris par l’Union aux termes du TIRPAA. Par ailleurs, la Cour rappelle que la réglementation actuelle prend en compte les intérêts économiques des opérateurs qui offrent à la vente des « variétés anciennes » ne satisfaisant pas aux conditions d’inscription aux catalogues officiels, en ce qu’elle n’exclut pas la commercialisation de ces variétés. Comme l’a souligné la Cour, la réglementation européenne, et son application sur notre territoire, tient déjà compte de la nécessité de prévoir certaines adaptations pour différentes typologies de variétés. Ainsi, des critères spécifiques d’inscription, accompagnés de dispositifs d’aide ou de gratuité d’inscription, ont été mis en place en France pour permettre l’accès au catalogue officiel de variétés anciennes ou destinées aux jardiniers amateurs. Près de trois cents variétés ont été inscrites au catalogue officiel français dans ces conditions. La Cour européenne de Justice, en tant que cour d’appel ultime de l’Union européenne, confirme la légitimité d’une réglementation mise en place historiquement pour limiter les pratiques abusives, voire dangereuses d’un point de vue phytosanitaire. Dans le cadre de la révision réglementaire en cours sur les semences et les plants, le ministère chargé de l’agriculture continuera à défendre l’accès au catalogue officiel des variétés végétales dans des conditions aménagées en tant que de besoin, dans le respect des principes fondamentaux de loyauté des échanges et de non distorsion de concurrence.