Niveau juridique : France
Question publiée au JO le : 07/08/2012 page : 4637
Texte de la question
M. François Brottes attire l’attention de M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt sur l’opportunité de procéder à une réforme de fond de la législation en vigueur sur le commerce des semences. La récente décision de la Cour de justice de l’Union européenne dans l’affaire Kokopelli contre Baumaux, qui opère un revirement complet avec la position de l’avocat général du 19 janvier 2012, illustre le rapport de force à l’Ĺ“uvre entre le droit des industriels d’un côté, et de l’autre celui des consommateurs, des agriculteurs indépendants, mais aussi et peut-être surtout les droits souverains de la nature, que certains pays, tels l’Équateur ou la Bolivie, en sont arrivés à reconnaître constitutionnellement, afin de les garantir face aux appétits insatiables des industries pétrochimiques et agro-alimentaires. En effet, cette décision dispose que la « productivité agricole accrue » serait supérieure en droit à la préservation de la biodiversité, à la qualité et la diversité des productions agricoles, à la santé des consommateurs comme des agriculteurs, ou encore au droit des agriculteurs d’exercer leur activité indépendamment des industries agro-chimiques. Il ne semble pas que cette décision aille dans le sens de l’intérêt général, présent et futur, ni du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Comme pour les PNPP (Préparations naturelles peu préoccupantes) ou les plantes médicinales, l’obligation faite aux producteurs d’enregistrer leurs semences au catalogue officiel conduit de fait à éliminer les productions artisanales ou traditionnelles, au profit des groupes industriels dont il semblerait que l’action de lobbying, tout au long de la procédure judiciaire, ait été déterminante. Eux seuls en effet sont en mesure de satisfaire tant aux procédures administratives longues et coûteuses, qu’à certains critères d’obtention, tels ceux d’homogénéité et de stabilité. Ces critères, qui garantissent certes un niveau de productivité plus important, sont de fait absents de la plupart des variétés traditionnelles « vivantes », ce qui constitue, du reste, leur principal atout, puisque cette « variabilité » permet précisément aux plantes de s’adapter à des conditions climatiques changeantes comme aux ravageurs, sans recours aux intrants chimiques ou semences génétiquement modifiées. Dans ce contexte, il souhaiterait connaître les intentions du Gouvernement en matière de révision de la législation en vigueur sur le commerce des semences.