Parlement européen : Réponse question E-006273-14 Marc Tarabella (S&D) - Accords UE-Canada et cour d’arbitrage privée

Niveau juridique : Union européenne

Question posée le 8-08-2014

Le gouvernement canadien a annoncé hier la conclusion de l’Accord économique et commercial global entre l’Union européenne et le Canada.

Dans la continuité des pratiques de la Commission européenne que les citoyens et les sociétés civiles européennes dénoncent de longue date, cet accord a été négocié sans transparence.

La Commission n’estime-t-telle pas que l’accord favorise un peu plus encore le modèle agro‐exportateur européen qui fragilise l’agriculture conventionnelle alors qu’elle devrait miser davantage sur la qualité et les marchés locaux que sur l’intensif et la compétitivité? Les règles sanitaires européennes concernant l’importation de viande pourront par ailleurs être suspendues pour permettre l’importation de bœuf aux hormones ou de colza génétiquement modifié…

Enfin, comment la Commission explique-t-elle que l’accord prévoie un mécanisme de règlement des différends qui permettra aux multinationales d’assigner un des gouvernements parties de l’accord devant un tribunal privé lorsqu’elles estimeront que leurs profits ont été ou pourront être hypothéqués par une décision publique? Ce mécanisme consacre le droit des investisseurs et des multinationales face au droit de réglementer de la puissance publique. Il s’agit pourtant là d’une clause que le Parlement européen ne veut pas voir dans le futur traité transatlantique. Comment cela est-il possible?

REPONSE donnée le 9-10-2014 par M. De Gucht au nom de la Commission

Tout au long des négociations en vue de la conclusion d’un accord économique et commercial global (AECG) entre l’UE et le Canada, la Commission a tenu le Parlement et le Conseil pleinement et immédiatement informés, ainsi que le prévoit le traité de Lisbonne. La société civile a également été informée.

Les denrées alimentaires importées continueront de satisfaire aux règles de l’UE en matière de sécurité alimentaire, qui ne seront pas modifiées par l’AECG.

L’arbitrage entre les États et les investisseurs étrangers, c’est-à-dire le règlement des différends entre investisseurs et États (RDIE), est la méthode classique de résolution des différends relatifs aux investissements; ce mécanisme fait partie des quelque 3 000 traités bilatéraux d’investissement (TBI) qui existent à travers le monde, dont près de la moitié sont actuellement en vigueur entre des États membres de l’UE et des pays tiers. Les négociations sur les dispositions du RDIE ont été guidées par les directives de négociation du Conseil de 2011, qui appellent à prévoir un «mécanisme de RDIE efficace», et par la résolution du Parlement européen sur la future politique européenne en matière d’investissements internationaux, qui préconise la mise en place de mécanismes de RDIE «afin d’assurer une protection globale des investissements» (paragraphe 32).

Les dispositions relatives au RDIE contenues dans l’accord économique et commercial global ne permettront pas à un investisseur d’introduire de recours au simple motif qu’il estime que ses profits sont hypothéqués. Une compensation ne peut être octroyée qu’en cas de violation de certains principes fondamentaux strictement définis, tels que la protection contre la discrimination, l’expropriation illégale et les traitements injustes. Le texte confirme explicitement le droit des parties de réglementer et ne laisse pas de place aux interprétations susceptibles d’ignorer les objectifs légitimes de politique publique tels que la santé ou la protection de l’environnement. L’AECG contient également d’autres garanties et exceptions importantes, notamment en ce qui concerne le secteur de l’audiovisuel et les mesures prises pour préserver la stabilité du système financier.

Lien : www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-%2f%2fEP%2f%2fTEXT%2bWQ%2bE-2014-006273%2b0%2bDOC%2bXML%2bV0%2f%2fFR&language=FR