Assemblée Nationale REPONSE Question N° : 49667 de M. André Chassaigne ( Gauche démocrate et républicaine - Puy-de-Dôme ) Question écrite - conséquences accords commerciaux Union européenne-Colombie-Pérou et Union européenne-Amérique centrale

Niveau juridique : France

Question publiée au JO le : 11/02/2014 page : 1152

Texte de la question

M. André Chassaigne interroge M. le ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé des affaires européennes, sur les conséquences sur la sécurité alimentaire et l’environnement des accords commerciaux Union européenne-Colombie-Pérou et Union européenne-Amérique centrale. Le 11 décembre 2012, le Parlement européen a voté la ratification de l’Accord de libre-échange entre l’Union européenne, la Colombie et le Pérou, et l’Accord d’association entre l’Union européenne et l’Amérique centrale, malgré l’opposition de plus de 160 organisations européennes et latino-américaines. 16 organisations associatives et syndicales françaises ont alerté le Gouvernement français et les eurodéputés sur les conséquences dramatiques de ces accords pour les droits des peuples autochtones, notamment les paysans, et l’environnement de ces pays. Elles appellent à juste titre les parlementaires français à ne pas les ratifier lors de leur examen. Ces accords renforceront le modèle d’exploitation minière et le statut d’exportateurs de matières premières de ces pays, avec de lourdes conséquences environnementales et sociales, notamment pour les communautés autochtones et les paysans. Comme l’ont montré certaines études d’impact, ces accords augmenteront la pression sur la terre et les territoires via le développement de nouveaux projets miniers et agro-industriels. Leur application menacerait lourdement la souveraineté et la sécurité alimentaire de ces pays, par la mise en concurrence avec des produits européens, ainsi que la production d’huile de palme, de sucre de canne et autres matières premières destinées aux agrocarburants. L’extension de ces productions impliquera une modification de l’utilisation des sols, l’affaiblissement du secteur des petites exploitations familiales, et le déplacement forcé des communautés autochtones de la région. Au regard des conséquences soulevées par ces accords, il souhaiterait connaître sa position sur leur contenu et s’il compte demander leur rejet par la représentation nationale au nom de la défense de l’intérêt général des populations concernées.

Réponse publiée au JO le : 22/07/2014

Les deux accords conclus en 2012 par l’Union européenne et ses Etats membres avec, d’une part, six Etats d’Amérique centrale et, d’autre part, la Colombie et le Pérou, sont le reflet du renforcement de nos liens avec les pays d’Amérique latine. Cette région, forte de son attachement à la démocratie et à la paix, ainsi que de sa jeunesse et de sa créativité, s’affirme en effet comme un pôle majeur du XXIème siècle. L’Union européenne et la France entendent l’accompagner dans ce processus, par un dialogue entre pairs. L’accord d’association conclu en 2012 avec six Etats d’Amérique centrale que la France s’apprête à ratifier comporte trois piliers : le dialogue politique, la coopération et le commerce. Le respect des principes démocratiques et des droits de l’Homme en constitue un élément essentiel. Il en va de même de l’accord commercial avec la Colombie et le Pérou. Ces deux accords s’inscrivent par ailleurs dans la perspective des objectifs du Millénaire pour le développement, selon lesquels le développement social doit aller de pair avec le développement économique afin d’assurer le renforcement de la cohésion sociale et de lutter contre la pauvreté, les inégalités, les injustices et l’exclusion sociale. A cet égard, une attention particulière a été apportée dans les accords concernés au respect des normes sociales et environnementales internationales et à la promotion d’un niveau d’exigence élevé en la matière. Les parties réaffirment leur engagement à oeuvrer au renforcement des cadres institutionnels, à l’élaboration et à la mise en oeuvre de politiques et de programmes relatifs aux principes et droits fondamentaux au travail, ainsi « qu’à l’application et au respect des conventions de l’Organisation internationale du travail » que les États membres de l’Union européenne et les Républiques d’Amérique centrale ont tous ratifiées. L’accord d’association conclu avec l’Amérique centrale poursuit ainsi expressément l’objectif de parvenir à rehausser le niveau des normes de bonne gouvernance, des normes sociales et environnementales et des normes du travail. De même, l’accord conclu avec la Colombie et le Pérou prévoit que le développement des échanges commerciaux et des investissements doit être mis en oeuvre de façon à contribuer à l’objectif de développement durable et doit aller de pair avec le maintien des niveaux de protection de l’environnement et de la législation du travail. En outre, la situation des droits de l’Homme étant une préoccupation majeure de l’Union européenne, le Parlement européen avait demandé aux gouvernements colombien et péruvien qu’ils lui soumettent chacun une feuille de route fixant des objectifs contraignants en matière de droits de l’Homme et d’environnement avant l’approbation de l’accord. Ces feuilles de route ont été soumises au Parlement européen en novembre 2012. Leur mise en oeuvre fait l’objet d’un suivi approfondi. C’est la raison pour laquelle l’accord prévoit une clause permettant de le suspendre en cas de non-respect des droits de l’Homme. Plusieurs Etats membres, dont la France, ont d’ailleurs souhaité - et obtenu - que cette clause suspensive puisse s’appliquer immédiatement, dès l’entrée en vigueur à titre provisoire de l’accord. Le pilier politique et le pilier de coopération sont indissociables du volet commercial de ces accords. La promotion du développement durable est incorporée dans toutes les sections de l’accord, et notamment dans la partie commerciale dont un chapitre est consacré au lien entre les politiques commerciales, sociales et environnementales. Ces accords visent ainsi au développement d’un partenariat politique privilégié, fondé sur le respect des droits de l’Homme, de la bonne gouvernance et du développement durable, qui conduira à l’intensification d’un dialogue politique permettant de partager ces valeurs avec nos partenaires.

lien : questions.assemblee-nationale.fr/q14/14-49667QE.htm