Niveau juridique : International
Texte du bulletin (traduction par nos soins) :
« 1. Éditorial
Au cours des trois mois qui se sont écoulés depuis notre dernier bulletin d’information, beaucoup de choses se sont produites dans le domaine de la protection des obtentions végétales. Le plus remarquable est la résistance de l’Indonésie à l’introduction de l’UPOV 91. Le gouvernement indonésien a fait valoir qu’un pays comme l’Indonésie a besoin d’une flexibilité suffisante pour protéger le système de semences de ses agriculteurs, ce que ne prévoit pas l’UPOV 91. Cette logique est également valable pour de nombreux autres pays du Sud.
2. L’Indonésie maintient sa position de ne pas adhérer à l’UPOV 1991
L’année dernière, le professeur Michael Fakhri, rapporteur spécial des Nations unies sur le droit à l’alimentation, a envoyé une communication au gouvernement indonésien et à l’Union européenne concernant la demande de l’UE, dans le cadre des négociations sur le libre-échange, de voir l’Indonésie se conformer à l’UPOV 91. Michael Fakhri a fait part de son inquiétude quant au fait que la conformité de l’Indonésie à l’UPOV 1991 créera des obstacles considérables à la pleine réalisation du droit à l’alimentation en Indonésie. Dans sa réponse, qui a été publiée sur le site web du Bureau des droits de l’homme des Nations unies en février, l’Indonésie a clairement indiqué qu’elle accordait la plus grande attention à la préservation d’un équilibre approprié entre les droits et les obligations des agriculteurs et des obtenteurs. Le pays a réitéré « sa position de ne pas adhérer à l’UPOV 1991 afin de garantir un espace politique pour protéger les systèmes de semences et les ressources phytogénétiques des petits exploitants agricoles ». L’Union européenne n’a pas encore répondu à la communication du rapporteur spécial.
3. Argentine : le processus d’adhésion à l’UPOV 91 est interrompu pour le moment
Le projet de « loi Omnibus » promu par le président Javier Milei comprend un article prévoyant que l’Argentine devrait devenir membre de l’UPOV 91. Cette proposition, soutenue par l’agro-industrie, est rejetée par plus de 1 400 organisations qui luttent pour la souveraineté alimentaire. Elles font valoir que depuis des années, une poignée de sociétés semencières transnationales et quelques sociétés nationales cherchent en vain à modifier l’actuelle loi sur les semences (n° 20.247 de 1973). Cette loi reconnaît aux entreprises des droits de propriété intellectuelle ("aux obtenteurs"), mais garantit également les droits des agriculteurs sur les fruits de leurs récoltes grâce à des semences certifiées. Le projet de loi Omnibus suggère que la décision soit prise « d’en haut », sans débat spécifique. Le 6 février, le projet de loi a été rejeté par la chambre basse au cours d’une procédure d’approbation article par article. La question de savoir quand la proposition concernant l’UPOV91 reviendra devant le Parlement reste ouverte.
4.Les agriculteurs zambiens et les groupes de défense des droits de l’homme se joignent à la campagne mondiale de protection des systèmes de semences des agriculteurs
Lorsque des organisations zambiennes ont rejoint la campagne internationale Stop UPOV en décembre dernier, l’Alliance zambienne pour l’agroécologie et la biodiversité (ZAAB) a clairement expliqué dans un communiqué de presse pourquoi cette opposition est si importante en Zambie aujourd’hui. « Limiter la capacité des personnes qui vous nourrissent est impensable - et pourtant, c’est exactement ce que veut l’UPOV. Nous devons tirer des leçons des autres pays qui luttent contre les chaînes du contrôle néocolonial des semences, et donc de la nourriture et, en fin de compte, de la population », a déclaré Mutinta Nketani, le coordinateur national de ZAAB.
5. Propriété intellectuelle et conception de la nature
Le professeur Brad Sherman, de l’université du Queensland, en Australie, et Josel Bellido, lecteur en droit à l’université du Kent, au Royaume-Uni, ont édité « Intellectual Property and the Design of Nature » pour « montrer que la manière dont le droit de la propriété intellectuelle s’est engagé avec la nature et l’a comprise s’inscrit dans une longue histoire et que bon nombre des problèmes auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui exigent une compréhension plus profonde de cette interaction ». Par exemple, l’article de Marie-Angèle Hermitte, directrice de recherche honoraire au CNRS à Paris, donne une vue d’ensemble des droits de brevet, de la protection des variétés végétales, du traité sur les semences de la FAO et du protocole de Carthagène. Elle écrit à propos du cadre juridique international : « S’agit-il d’une partition d’orchestre où les instruments sont introduits dans le désordre puis réarrangés ? En l’état, ce n’est rien d’autre qu’une cacophonie ».
6.Un examen complet des incidences des droits de propriété intellectuelle sur l’économie agricole mondiale
Dans l’étude de Manohar Lal Meghwal, professeur adjoint au département d’horticulture de l’université de Mewar, Chittorgarh, Inde, et autres, les auteurs concluent que « si des régimes de propriété intellectuelle solides garantissent une compensation équitable aux sélectionneurs et aux innovateurs, l’accès potentiellement limité aux semences, en particulier pour les petits agriculteurs des pays en développement, suscite des inquiétudes. L’équilibre entre les droits des sélectionneurs et les besoins des agriculteurs devient un aspect crucial de la formulation de la politique agricole, en vue d’un système agricole durable et inclusif ». »
Lien vers le communiqué sur le site d’APBREBES ICI