Sénat : Projet de loi biodiversité - examen en commission du développement durable

Niveau juridique : France

Extraits choisis des débats en commission du développement durable, repérage des sujets qui recoupent les amendements proposés par le collectif Semons La Biodiversité ( cf www.semonslabiodiversite.com/wp-content/uploads/2015-06-04-Propositions-damendements-loi-biodiversit%C3%A9-texte-transmis-au-S%C3%A9nat-359_Collectif-Semons-la-Biodiversit%C3%A9-et-France-Libert%C3%A9s.pdf )

  • SUR LA QUESTION DES BREVETS

Articles additionnels après l’article 4 ter

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - L’amendement n° COM-396 rectifié introduit en droit français une action de groupe en réparation du préjudice environnemental. La procédure proposée reprend presque mot pour mot celle qui a été introduite par la loi sur la consommation. Elle pose de lourds problèmes juridiques…

L’amendement n° COM-396 rectifié est retiré.

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - Les trois amendements nos COM-350 rectifié, COM-171 et COM-170, quasiment identiques, posent la question fondamentale de la brevetabilité du vivant. L’Office européen des brevets a délivré un brevet à un type de brocoli spécialement adapté pour faciliter sa récolte. Or, ce brevet couvre une caractéristique technique susceptible de s’appliquer à toute une série de variétés végétales. Une affaire similaire a eu lieu avec une tomate. Les plantes obtenues par des procédés non brevetables peuvent-elles bénéficier d’un brevet européen ? On constate une évolution inquiétante en ce sens. L’attribution de brevets sur des gènes et des traits natifs de certains végétaux, ou sur des végétaux obtenus par des procédés essentiellement biologiques, menace l’innovation, surtout chez les PME et les agriculteurs, et pousse à une concentration autour de quelques grandes multinationales. Un sélectionneur de semences agricoles qui obtiendrait, par un processus classique de croisement, une nouvelle variété comportant un gène breveté pourrait déposer un certificat d’obtention végétale (COV) mais serait certainement poursuivi pour contrefaçon puisqu’il aurait utilisé un gène protégé, alors même que ce gène existe à l’état naturel.

Les trois amendements excluent clairement de la brevetabilité les plantes issues de procédés essentiellement biologiques et les gènes natifs. Le sujet, consensuel, a fait l’objet d’un groupe de travail sur la propriété intellectuelle animé par le ministère de l’agriculture. Je souhaite que nous indiquions nettement à l’article L. 611-19 du code de la propriété intellectuelle que les produits issus de procédés essentiellement biologiques ne sont pas brevetables - sous réserve d’une modification rédactionnelle.

La question des gènes ou des traits natifs est plus délicate car leur définition scientifique est plus difficile à formuler. Je vous propose donc de n’adopter pour l’instant que la première partie de ces amendements, qui porte sur les procédés essentiellement génétiques, et de nous laisser le temps, avant la séance, d’améliorer leur rédaction sur le volet des gènes natifs, en concertation avec le Gouvernement.

Ce sujet n’est pas exclusivement français, mais européen. Notre décision ne s’appliquera qu’à l’Institut national de la propriété industrielle (INPI), qui a la même interprétation que nous de la brevetabilité du vivant. Notre vote constituera néanmoins un signal politique fort, sur lequel le Gouvernement pourra s’appuyer lors des discussions qui interviendront en 2016 sous la présidence néerlandaise de l’Union européenne. Nous devrons demander des engagements à la ministre.

J’émets donc un avis favorable aux amendements nos COM-350 et COM-171, à condition qu’ils soient formulés ainsi :

Au 3° du I de l’article L. 611-19 du code de la propriété intellectuelle, après le mot : « animaux », insérer les mots : « ainsi que les produits qui en sont issus ».

M. Rémy Pointereau. - Il ne faut pas mélanger le végétal et l’animal : je vous propose de surseoir. Rapporteur de la loi sur les COV, j’ai pris la mesure de la complexité du sujet. Consultons des spécialistes avant de nous prononcer, pour mieux comprendre les conséquences de notre vote.

Mme Évelyne Didier. - Ce sujet a été traité lors du débat sur les COV mais pas entièrement. Si une plante, créée par une méthode habituelle de croisement, est utilisée par un agriculteur, et que quelqu’un dépose un brevet sur une partie de ses gènes, cette personne s’approprie la plante.

M. Rémy Pointereau. - Quoique producteur de semences, j’ignore l’état du droit en la matière. Qui peut en avoir une idée claire ?

Mme Évelyne Didier. - Ceux qui comme moi ont travaillé le sujet pour préparer leurs amendements.

M. Hervé Maurey, président. - Les rectifications proposées par le rapporteur étant substantielles, considérons son avis comme défavorable.

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - Ne nous précipitons pas, en effet. Nous avons le temps de bien faire et chacun peut souhaiter s’informer plus complètement.

M. Ronan Dantec. - Mon amendement n° 350 rectifié est inspiré par des travaux menés en 2011, sous le précédent gouvernement. Il est consensuel. J’aimerais qu’il soit adopté, pour être présenté en séance par le rapporteur.

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - Je vous propose de nous réunir pour y travailler ensemble.

M. Rémy Pointereau. - Cette question mérite un texte en soi.

Mme Sophie Primas, rapporteure pour avis. - Les interlocuteurs que nous avons eus souhaitent protéger les COV afin que de gros acteurs internationaux ne viennent pas tout breveter. Je comprends toutefois la prudence de mes collègues.

Les amendements nos COM-350 rectifié, COM-171 et COM-170 sont retirés.

  • Sur l’article 26 -amendement 7 de Semons la Biodiversité - obligations du droit des agriculteurs par rapport à l’application du TIRPAA :

Article 26

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - L’amendement n° COM-180 supprime l’article 26, qui renvoie à une ordonnance la détermination du régime d’APA applicable aux ressources agricoles non couvertes par le traité international sur les ressources phytogénétiques pour l’alimentation et l’agriculture (Tirpaa).

Je conviens que le renvoi à une ordonnance n’est pas satisfaisant. Pour autant, la suppression de cette habilitation, par ailleurs bien encadrée, serait contre-productive. D’une part, il est utile que ce soit le ministère de l’agriculture qui détermine le régime d’APA applicable aux ressources domestiquées et cultivées ainsi qu’aux espèces végétales apparentées. Les travaux de réflexion ont commencé, et le ministère de l’agriculture est le mieux à même d’engager la concertation avec le monde agricole.

D’autre part, supprimer cette ordonnance signifierait qu’on ne prévoit aucune protection juridique pour l’accès et l’utilisation de ces ressources agricoles, ce qui est contraire à l’objectif du projet de loi et à l’intérêt des agriculteurs. Avis défavorable.

L’amendement n° COM-180 n’est pas adopté.

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - L’amendement n° COM-352 prévoit que l’ordonnance à venir sur l’accès et l’utilisation des ressources génétiques agricoles devra appliquer le Tirpaa. Celui-ci est d’ores et déjà applicable pour les 64 espèces agricoles listées dans son annexe I. L’ordonnance a pour objet de définir un régime protecteur pour les autres ressources, non couvertes. On me dit que le projet d’ordonnance s’inspirerait du Tirpaa et prévoirait un accord-type de transfert de matériel, qui contiendrait les modalités de partage des avantages. Avis défavorable sur cet amendement, dont l’esprit sera satisfait en pratique.

L’amendement n° COM-352 n’est pas adopté.

L’article 26 est adopté sans modification.

  • Sur les VRTH et sur les pesticides

Articles additionnels après l’article 51 sexdecies

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - Les amendements nos COM-181 rectifié et COM-353, quasiment identiques, visent, pour l’un à suspendre, pour l’autre à interdire à compter de 2016, l’utilisation, la culture et la commercialisation de semences de colza et de tournesol tolérantes aux herbicides issues de mutagenèse. J’y suis défavorable, d’abord parce qu’on attend un rapport de l’Anses et qu’il est impossible de prendre position sur un sujet aussi complexe sans expertise scientifique, ensuite parce qu’ils posent un problème de conformité au droit européen.

Les amendements nos COM-181 rectifié et COM-353 ne sont pas adoptés.

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - L’amendement n° COM-363 a été rejeté à plusieurs reprises par le Sénat lors de la discussion sur la loi d’avenir pour l’agriculture. Laissons fonctionner le droit européen et le système national d’évaluation des pesticides. Avis défavorable.

L’amendement n° COM-363 n’est pas adopté.

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - Avis défavorable à l’amendement n° COM-368, l’étiquetage des huîtres étant de nature réglementaire.

L’amendement n° COM-368 n’est pas adopté.

  • Sur les Néonicotinoïdes

Article 51 nonies

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - Les amendements nos COM-38, COM-65, COM-126, COM-195 et COM-500 suppriment l’article 51nonies, selon lequel le plan Ecophyto valorise les projets territoriaux supprimant les néonicotinoïdes. Il ne s’agit pas de flécher les fonds Ecophyto vers la réduction de l’usage des néonicotinoïdes, mais seulement de garantir qu’un volet du plan s’attache spécifiquement à traiter cette question. Nous aurons le débat sur l’interdiction pure et simple de ces substances, et je donnerai d’ailleurs un avis favorable, de raison et non de coeur, aux amendements de suppression. Ici, il s’agit de donner une priorité politique à la réduction de l’usage des néonicotinoïdes. C’est un signal important. Autant on peut comprendre qu’il ne soit pas possible de supprimer les néonicotinoïdes, l’agriculture ne pouvant, en l’état, s’en passer, autant il serait curieux de refuser des crédits pour des études recherchant une solution de long terme. Le plan Ecophyto doit donner la priorité à cette question.

M. Ronan Dantec. - Nous avons dit tout à l’heure qu’il fallait faire confiance aux acteurs territoriaux. La suppression de cet article serait incompréhensible. Attention à ne pas donner l’impression qu’on a des tabous en supprimant tous les articles comportant le mot « néonicotinoïdes ». Le problème sanitaire est connu, ne soyons pas dans le déni.

Mme Sophie Primas, rapporteure pour avis. - Sans être plus écologiste que les écologistes, pourquoi cibler systématiquement les néonicotinoïdes ? D’autres substances posent question sur le plan sanitaire. Mais la mode est à la dénonciation des néonicotinoïdes… Quel est l’intérêt de flécher spécifiquement le plan Ecophyto sur ces produits ? Je comprends le signal envoyé, mais il n’est pas efficient. Les priorités du plan Ecophyto ne doivent pas être déterminées par la loi, faisons confiance au comité de suivi.

M. Rémy Pointereau. - On fait fausse route en supprimant des matières actives, notamment pour la culture de colza. Résultat, il faut traiter jusqu’à cinq fois au lieu d’une avec un produit ciblé, ce qui pollue davantage la terre et provoque des problèmes de santé chez les agriculteurs. Donnons le temps aux opérateurs de trouver de nouvelles substances moins toxiques. Nous sommes à un tournant.

M. Michel Raison. - Certains produits de la famille des néonicotinoïdes ne posent apparemment pas de problème. Le législateur ne peut se contenter d’écouter des slogans, il doit s’appuyer sur des études scientifiques précises.

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - Je voterai la suppression de l’interdiction, mais faisons un effort sur cet article-ci, dans un souci d’équilibre.

M. Hervé Maurey, président. - Le rapporteur établit une distinction claire entre les deux dispositifs, celui-ci qui prévoit que l’on travaille à des alternatives, et l’autre qui interdit l’utilisation de ces produits.

Les amendements identiques nos COM-38, COM-65, COM-126, COM-195 et COM-500 ne sont pas adoptés.

L’article 51 nonies est adopté sans modification

et

Article 51 quaterdecies

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - Je suis favorable à l’amendement de suppression n° COM-39. Seule l’Europe peut interdire les néonicotinoïdes. Ne soyons pas hypocrites. Ceux qui prônent l’interdiction au niveau national savent que c’est juridiquement impossible. Mais refuser l’interdiction ne signifie pas qu’on se lave les mains du problème. J’ai longuement reçu tous les représentants des entités concernées par la vie des abeilles. Le principe de réalité s’impose. Si je vote la suppression de l’interdiction, je ne ferme pas pour autant les yeux sur les problèmes sanitaires que posent les néonicotinoïdes. Les abeilles sont en train de disparaître.

Mme Évelyne Didier. - Sans abeilles, plus de biodiversité…

M. Ronan Dantec. - Les facteurs de mortalité des abeilles sont multiples. Certains estiment qu’il n’y a donc pas lieu d’en stigmatiser un en particulier. Reste que l’impact des néonicotinoïdes sur les populations d’abeilles est scientifiquement documenté. La France peut tout à fait prendre des mesures, elle l’a déjà fait dans d’autres contextes. Ce n’est pas un problème juridique.

En réalité, certains groupes considèrent que la suppression des néonicotinoïdes nuirait à leurs intérêts économiques. On peut l’entendre, mais le coût économique de l’effondrement des populations d’abeilles est incommensurablement supérieur ! Utiliser les néonicotinoïdes est une aberration économique, leur impact négatif est scientifiquement prouvé : nous sommes d’abord face à un drame économique ! Je voterai contre la suppression.

M. Michel Raison. - Il serait souhaitable que la commission se penche spécifiquement sur la question de la mortalité des abeilles, domestiques ou sauvages. L’observation des populations selon les zones géographiques révèle de grandes surprises. Notre collègue Gremillet, qui a présidé le syndicat des apiculteurs des Vosges, a ainsi constaté que la mortalité des abeilles était plus importante dans les zones de montagne, non cultivées. Or l’abeille ne se déplace que de trois kilomètres. Rien ne sert de désigner un bouc émissaire et d’interdire les produits de traitement, quand on sait que la principale cause de la mortalité des abeilles est la non-prophylaxie. Les races actuelles sont bien plus faibles. Beaucoup de reines ont été importées, avec des maladies, outre la varroase et la loque. Beaucoup de producteurs de miels sont des amateurs qui n’investissent pas dans la prophylaxie. Le vrai problème est là, pas dans tel ou tel produit…

M. Rémy Pointereau. - Je partage cet avis.

M. Ronan Dantec. - Pas les scientifiques…

Mme Nicole Bonnefoy. - Je suis favorable à l’interdiction des néonicotinoïdes, qui viendra un jour. Attendons les études de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA), fin 2015, et de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), demandées par la ministre. Je m’interroge en outre sur une interdiction au 1er janvier 2016, sachant que la loi ne sera pas votée à cette date… Sur le fond, notre débat sera éclairé par les informations scientifiques.

M. Hervé Maurey, président. - Cet article mérite sans doute un amendement rédactionnel, au-delà des questions de fond, précisant que l’interdiction entrera en vigueur six mois après la promulgation de la loi, par exemple.

M. Ronan Dantec. - Je le déposerai pour la séance.

Les amendements identiques nos COM-39, COM-66, COM-96, COM-127, COM-196 et COM-502 sont adoptés et l’article 51quaterdecies est supprimé.

Sur l’article 18 – (amendements 2 à 7 de Semons la Biodiversité)

  • SUR l’Article 18

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - L’amendement n° COM-609 place au sein d’un nouveau paragraphe 1 bis des dispositions relatives à l’entrée en vigueur du dispositif d’accès et de partage des avantages (APA) prévu à l’article 18, qui ont inquiété les chercheurs que nous avons auditionnés, Mme Primas et moi-même. Le régime d’APA ne s’applique qu’aux accès postérieurs à la promulgation de la loi pour les projets de recherche fondamentale. Un chercheur travaillant sur une ressource à laquelle il avait accédé avant la loi devra faire une simple déclaration après la promulgation de la loi. La recherche à visée commerciale est, elle, soumise à une procédure d’autorisation en cas d’utilisation de ressources après la promulgation de la loi, mais elle le sera aussi, pour des ressources auxquelles elle a eu accès avant, si l’objet de la recherche est modifié nettement : si une plante guyanaise sert à des recherches sur un shampoing, et que de nouvelles recherches sont engagées sur la même plante pour une crème pour le visage, une nouvelle autorisation APA sera nécessaire. L’amendement ne modifie pas la date d’entrée en vigueur des dispositions.

Actuellement, 90 % de la biodiversité connue est conservée dans des collections ; si celles-ci étaient exclues de l’APA, les dispositions ne vaudraient plus que pour 10 % de la biodiversité. Nous sécurisons le régime d’avenir pour les espèces domestiquées et cultivées ou sauvages apparentées, l’amendement excluant les ressources agricoles, comme le souhaitait Mme Primas qui propose dans son amendement n° COM-41 la suppression des alinéas 49 à 53 de l’article.

Mme Sophie Primas, rapporteure pour avis. - Je ne crois pas que cette rédaction résolve le problème car il s’agit d’autres utilisations qu’agricoles. La « nouvelle utilisation » n’est pas définie, nous ne connaissons pas la teneur de l’ordonnance qui devrait la définir, et cela ne résout même pas le cas de nouvelle utilisation sur une ressource dont on est propriétaire mais dont on ne connaît pas l’identité ni l’histoire.

Mme Annick Billon. - Vous avez raison, ce ne sont pas seulement des ressources naturelles.

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - La propriété des ressources n’est pas en cause. Toute ressource génétique est propriété de l’État. Les ressources agricoles sont exclues du champ d’application. Une ordonnance prévoit d’autres modalités relatives aux dispositions du Traité international sur les ressources phytogénétiques pour l’agriculture et l’alimentation (Tirpaa). Nous avons pris toutes les précautions pour répondre à cette interrogation. Nos deux commissions auront cependant le temps de rapprocher leurs points de vue avant le débat en séance dans deux mois.

Mme Évelyne Didier. - Cette question complexe le mérite.

Mme Sophie Primas, rapporteure pour avis. - Cela rejoint le sujet des brevets.

M. Hervé Maurey, président. - Tenons-nous en, pour aujourd’hui, aux propositions du rapporteur.

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - Je partage l’objectif de protection de la commission des affaires économiques, mais il serait dommage d’exclure 90 % de la ressource appartenant aux collections, et ce serait contraire au protocole de Nagoya ainsi qu’aux engagements du règlement européen qui s’appliquent en droit interne.

Mme Sophie Primas, rapporteure pour avis. - C’est effectivement l’inverse que nous recherchons.

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - Nous nous accordons donc sur l’objectif.

Mme Sophie Primas, rapporteure pour avis. - La commission des affaires économiques a conscience que son amendement est imparfait, mais le texte ne nous rassure pas sur l’utilisation de certaines ressources dont on ne connaît pas l’antériorité. Gardons-nous de faire disparaître la diversité des sélectionneurs et des origines. Je retire mon amendement, car nous aurons le temps de nous accorder.

L’amendement n° COM-609 est adopté.

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - L’amendement n° COM-610 précise les motifs pour lesquels l’administration pourra refuser une autorisation d’accès à une ressource génétique : le critère d’affectation significative de la biodiversité - terme trop flou - devra s’entendre comme la restriction de l’utilisation durable de la ressource ou son épuisement.

L’amendement n° COM-610 est adopté, ainsi que l’amendement rédactionnel n° COM-611.

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - L’amendement n° COM-1771 et le n° COM-2742 sont quasiment identiques. Reprendre dans le texte les termes de la convention pour la diversité biologique - les « communautés autochtones locales » - poserait problème, car la France est une République une et indivisible. Le projet de loi mentionne des « communautés d’habitants », soit un équilibre fragile. Vos amendements sont satisfaits sur le fond car les modes de vie des communautés sont déjà évoqués. Retrait ou avis défavorable. Nous devons être très rigoureux juridiquement sur les populations autochtones pour éviter de fragiliser des années de recherche, avec le risque de questions prioritaires de constitutionnalité. Au Gouvernement d’assumer l’équilibre qu’il propose.

Mme Évelyne Didier. - Où est le terme de communauté dans l’amendement qui cite des « modes de vie traditionnels ou des pratiques » ? Il s’agit juste de prendre en compte des manières de vivre.

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - Cela fragilise tout de même le dispositif.

Mme Évelyne Didier. - Je retire l’amendement mais nous en reparlerons.

L’amendement n° COM-177 est retiré.

M. Ronan Dantec. - Une communauté traditionnelle ne tirant pas ses moyens de subsistance du milieu naturel mais qui en a gardé une connaissance forte serait exclue. Mieux vaut se rapprocher de la rédaction de la convention pour la diversité biologique sans utiliser le mot communauté. La formulation que vous nous proposez est tout aussi fragile.

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - Je me suis interrogé durant les auditions du directeur du parc national de Guyane et de la vice-présidente du Conseil régional de Guyane. Il existe des habitants issus de communautés mais vivant en périphérie de villes comme Cayenne. Le terme « traditionnellement » répond à la difficulté. Un grand chef coutumier était à Paris lors de l’adoption du texte sur la Nouvelle-Calédonie ; il reste chef à Paris, il ne l’est pas uniquement en forêt. C’est le lien à la communauté qui est essentiel.

L’amendement n° COM-274 est retiré.

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - L’amendement n° COM-2753 complète la définition des collections par celle de collection in situ et ex situ, des espèces cultivées, des exploitations agricoles. À vouloir trop préciser cette définition, on en restreint excessivement le champ, au risque d’une mauvaise interprétation. La définition actuelle reprend celle du règlement européen de 2014. Gardons une certaine cohérence juridique. Retrait ou avis défavorable.

L’amendement n° COM-275 est retiré.

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - Même avis pour l’amendement n° COM-1784.

L’amendement n° COM-178 n’est pas adopté.

Mme Annick Billon. - L’amendement n° COM-320 rejoint les préoccupations de Mme Primas.

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - Cet amendement exclut du champ de l’APA les ressources génétiques présentes dans plusieurs pays : le dispositif de protection serait vidé de son sens. La France n’est pas seulement un utilisateur de ressources génétiques mais aussi un des premiers fournisseurs au monde. Il faut protéger nos ressources génétiques et garantir un partage des avantages qui en sont issus.

Imaginons qu’une ressource soit disponible à 90 % sur le territoire français, en Guyane par exemple, et que les 10 % restants se trouvent au Suriname. Il n’y aurait plus de protection alors que l’essentiel de la ressource se situe sur notre territoire. Le dispositif d’APA de Guyane - tout comme ceux du Brésil, du Costa Rica ou d’Australie - n’a pas fait fuir les chercheurs ni les entreprises. Avis défavorable.

Mme Annick Billon. - Je retire cet amendement mais le déposerai de nouveau car 90 % de la ressource peut être à l’étranger et exploitée par de grands groupes internationaux.

L’amendement n° COM-320 est retiré.

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - L’amendement n° COM-264 inclut dans le champ d’application de l’APA les connaissances traditionnelles qui ne peuvent pas être attribuées à une communauté d’habitants - l’APA requiert d’identifier la personne avec laquelle est négocié le partage des avantages. L’État ne détient que les ressources génétiques, non les connaissances traditionnelles associées. Le dispositif ne me semble pas pertinent et je ne vois pas quels cas spécifiques seraient éventuellement visés. Avis défavorable

L’amendement n° COM-264 est retiré.

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - Les connaissances traditionnelles associées à des ressources dont les propriétés sont bien connues et ont été utilisées de longue date et de façon répétée sont exclues du champ de l’APA dans la rédaction actuelle de l’article 18. L’amendement n° COM-265 les y inclut lorsqu’elles ont fait l’objet de recours ou de contestation quant à leur appropriation abusive : c’est un nid à contentieux ! Comment déterminera-t-on si une connaissance a fait effectivement l’objet d’un recours ou d’une contestation ? Faut-il que le juge se soit prononcé ? Une tribune dans un journal ou sur internet constitue-t-elle une contestation ? L’amendement serait difficilement applicable. Avis défavorable.

L’amendement n° COM-265 n’est pas adopté.

L’amendement n° COM-41 est retiré.

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - Pour les raisons déjà évoquées, avis défavorable à l’amendement n° COM-328 supprimant l’obligation de se soumettre à la procédure d’APA pour toute nouvelle utilisation dans une recherche à but commercial sur des ressources déjà en collection avant l’entrée en vigueur de la loi.

L’amendement n° COM-328 est retiré.

Mme Annick Billon. - Ces amendements protègent les entreprises et l’activité.

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - Les amendements identiques nos COM-179 et COM-351 imposent au bénéficiaire d’une autorisation APA française de s’engager à ne revendiquer aucun droit de propriété intellectuelle limitant l’accès à ces ressources génétiques pour la recherche, la conservation, l’utilisation durable, la valorisation ou l’exploitation commerciale. Car ce qui n’est pas possible en France ni en Europe l’est ailleurs. Un industriel pourrait ainsi faire breveter au Japon un gène natif d’une plante prélevée en Guadeloupe, et restreindrait par conséquent l’accès aux ressources génétiques sauvages de cette plante en France. Avec ces amendements, il se verrait retirer son certificat de conformité au protocole de Nagoya. Son brevet, délivré au Japon, ne pourrait lui être retiré, mais il serait placé dans une situation de biopiraterie passible de sanctions. Cela protège davantage nos ressources et lutte contre la brevetabilité du vivant, en l’occurrence des gènes natifs. J’y suis favorable.

Pour autant je propose de les rectifier en ajoutant un seul alinéa V dans le paragraphe 6 qui prévoit les dispositions communes au sein du régime d’APA, après l’alinéa 119 : « la déclaration ou l’autorisation engagent le bénéficiaire à ne revendiquer aucun droit de propriété intellectuelle ni aucun autre droit limitant l’accès à ces ressources génétiques, à leurs parties ou à leurs composantes génétiques, sous la forme sous laquelle elles ont été fournies, pour la recherche, leur conservation, leur utilisation durable, leur valorisation ou leur exploitation commerciale. »

Mme Évelyne Didier. - Soit.

Les amendements nos COM-179 et COM-351 ainsi rectifiés, sont adoptés.

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - L’amendement n° COM-266 prévoit une restitution systématique aux communautés d’habitants des informations et connaissances acquises à partir des ressources génétiques. Le ministère prépare les textes d’application de cet article 18 : ils prévoiront un contrat-type de partage des avantages dans le cas d’une déclaration en vue d’une recherche sans but commercial. Cela ne relève pas du niveau législatif. Retrait ou avis défavorable.

L’amendement n° COM-266 est retiré.

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - L’amendement n° COM-267 - premier d’une série d’amendements qui posent peut-être un problème de constitutionnalité - impose de recueillir le consentement des communautés d’habitants pour accéder à une ressource génétique sur leur territoire. Actuellement leur consultation et leur consentement ne sont prévus que pour l’utilisation des connaissances traditionnelles. L’accord des communautés d’habitants, détentrices de ces savoirs traditionnels souvent depuis des décennies, voire des siècles - les Amérindiens par exemple - est nécessaire pour utiliser ces connaissances à des fins de recherche fondamentale ou appliquée. Le protocole de Nagoya impose le consentement préalable seulement en cas de droit établi d’accorder l’accès aux ressources, ce qui n’est pas le cas en France puisque les ressources n’appartiennent pas aux habitants mais à la nation.

Prenons garde à ne pas alourdir excessivement les contraintes pour les entreprises et pour les chercheurs. Avis très défavorable, ce type d’amendements menace l’équilibre de l’APA en faisant peser un très fort risque d’inconstitutionnalité.

L’amendement n° COM-267 n’est pas adopté.

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - Dans la lignée du précédent, l’amendement n° COM-268 donne un droit de veto pour l’accès aux ressources génétiques à des communautés d’habitants non propriétaires de ces ressources en droit. Avis défavorable en raison des risques d’inconstitutionnalité et parce que ce n’est pas dans l’esprit de Nagoya.

L’amendement n° COM-268 n’est pas adopté.

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - Même avis sur les amendements identiques n° COM-269 et n° COM-301, qui soumettent la délivrance d’une autorisation au consentement préalable des communautés d’habitants qui ne sont pas propriétaires des ressources génétiques.

Les amendements nos COM-269 et COM-301 ne sont pas adoptés.

L’amendement n° COM-271 n’est pas adopté.

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - L’amendement n° COM-272 rend automatique le refus d’autorisation d’accès si l’une des trois conditions énumérées n’est pas remplie. Pourquoi une telle rigidité ? Le premier motif de refus est l’absence de signature d’un accord de partage des avantages. Soit. Mais les deux autres motifs, capacités techniques et financières insuffisantes, et menace sur l’épuisement de la ressource génétique, requièrent une appréciation plus fine, au cas par cas, avec possibilité de recours devant le juge. Avis défavorable.

L’amendement n° COM-272 est retiré.

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - L’amendement n° COM-329 supprime les alinéas 71 à 73 prévoyant les modalités financières de partage des avantages, actuellement plafonnées par le texte à 5 % du chiffre d’affaires mondial de l’entreprise. Je n’y suis pas favorable. Le partage des avantages, s’agissant d’une utilisation à visée commerciale, est défini par un accord librement négocié. Le projet de loi fixe simplement un plafond. La part monétaire pourra être très faible, voire nulle, si l’industriel propose des avantages en nature « justes et équitables », selon le critère défini à Nagoya. Avis défavorable.

L’amendement n° COM-329 est retiré.

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - L’amendement n° COM-276 pose le même problème que les amendements précédents sur le consentement des communautés d’habitants, et donne un droit de veto à ces dernières sur l’utilisation par l’AFB des fonds récupérés après partage des avantages, lorsque les ressources utilisées étaient conservées par ces communautés. Avis défavorable.

L’amendement n° COM-276 n’est pas adopté, de même que l’amendement n° COM-273.

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - Les amendements identiques nos COM-277 et COM-302 prévoient, dans le cas où l’utilisation autorisée entraîne une demande de brevet, la transmission des informations sur l’origine de la ressource génétique ou de la connaissance traditionnelle à l’Inpi, qui n’en dispose pas toujours. Ces amendements sont satisfaits par la rédaction de l’alinéa 128. Retrait.

Les amendements nos COM-277 et COM-302 ne sont pas adoptés.

M. Jérôme Bignon, rapporteur. - L’amendement n° COM-303 soumet à l’APA les entreprises opérant à l’étranger, quand bien même l’État sur le territoire duquel elles prélèvent la ressource génétique ou la connaissance traditionnelle associée n’aurait signé ni la convention sur la diversité biologique ni le protocole de Nagoya. Or on ne peut sans atteinte à la souveraineté d’autres pays appliquer le droit français à l’étranger ! Avis défavorable.

L’amendement n° COM-303 est retiré.

L’article 18 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.