Sénat : Projet de loi biodiversité : examen en commission des affaires économiques

Niveau juridique : France

EXTRAITS CHOISIS du CR :

Mme Sophie Primas, rapporteur pour avis : ( …)

J’en viens maintenant à l’examen des articles sur lesquels votre commission s’est saisie pour avis. En accord avec la commission du développement durable, saisie au fond, nous ne nous sommes pas saisis pour avis de l’ensemble du texte, mais uniquement des aspects touchant directement au champ de compétence de notre commission. Ce qui ne veut pas dire que nous n’avons pas d’avis sur le reste, et en particulier sur la gouvernance de l’Agence française pour la biodiversité.

Je me suis d’abord intéressée aux mécanismes d’accès aux ressources génétiques et de partage des avantages, mis en place par le titre IV. Ces mécanismes mettent en oeuvre le droit des États à protéger leur patrimoine, pour lutter notamment contre la biopiraterie et l’appropriation abusive de ressources collectives. À l’article 18, je proposerai, après avoir entendu les craintes des professionnels de la recherche, en particulier dans le domaine des semences et de l’innovation variétale, de supprimer l’exigence de preuve de l’origine des ressources génétiques pour les collections anciennes.

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Mes propositions sont inspirées par un seul objectif : préserver la biodiversité, certes, mais de manière pragmatique, sans le faire contre les acteurs économiques et les professionnels de terrain. Les députés, peut-être par dogmatisme, au nom d’une conception un peu trop rigide de la défense de la biodiversité, avaient marqué une méfiance excessive à l’encontre de ces professionnels, qui n’incite pas à une démarche partenariale. Essayons plutôt de faire confiance, pour créer les conditions de la réussite collective en matière de biodiversité.

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M. Joël Labbé. - Je salue le travail de Sophie Primas même si je ne puis souscrire à toutes ses propositions. Je défends le fond de ce texte, qui mérite cependant d’être amélioré. Sur la question des ressources génétiques, de grosses sociétés de recherche sont engagées, face auxquelles les peuples des forêts primaires, en particulier, doivent être protégés. J’ai reçu, pas plus tard qu’hier soir, les représentants d’une peuplade indienne dont toutes les terres risquent d’être inondées par un projet de barrage sur le fleuve Tapajós. Or, des sociétés françaises sont impliquées dans ce projet. La responsabilité de notre pays, qui accueillera bientôt la Cop 21, est donc engagée.

Oui, la biodiversité engage l’économique et le social. L’agroécologie est plus créatrice d’emplois, elle a moins d’impact sur le milieu, et peut même avoir un impact positif - je pense, notamment, aux pollinisateurs.

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Mme Sophie Primas, rapporteur pour avis. - Je vous remercie de votre soutien. Je rassure M. Labbé : ce que je propose sur la ressource génétique ne remet pas en cause le partage des avantages. Il est important de respecter les usages et de lutter contre la biopiraterie. Mon amendement ne vise que quelques alinéas, qui posent problème, notamment, aux petits semenciers. Il me semble important de protéger nos entreprises.

Je n’entrerai pas dans le débat sur les néonicotinoïdes, qui aura lieu en séance.

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Article 18

Mme Sophie Primas, rapporteur pour avis. - Mon amendement n° 33 vise à lever une ambiguïté dans la rédaction de l’article 18, qui organise l’accès et le partage des avantages liés aux ressources génétiques et connaissances traditionnelles. Une lecture stricte de ses alinéas 49 à 53 pourrait en effet laisser croire que lorsque le détenteur d’une collection de ressources constituée avant l’entrée en vigueur de la loi réutilise ses ressources pour un nouveau développement à but commercial, il doit passer de nouveau par la procédure d’accès et de partage des avantages. Une telle interprétation serait dangereuse, en particulier pour les instituts de recherche comme l’Institut national de la recherche agronomique (INRA), qui ont constitué des collections depuis des décennies sans toujours pouvoir en retracer l’historique.

M. Martial Bourquin. - Nous nous abstiendrons.

M. Joël Labbé. - Je voterai contre l’amendement.

L’amendement n° AFFECO.33 est adopté.

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