Un bilan de la loi sur les certificats d’obtention végétale votée le 28 novembre 2011
Guy Kastler,
Résumé
La nouvelle loi française du 8 décembre 2011 relative aux certificats d’obtention végétale (COV) a été présentée comme un simple ajustement technique destiné à légaliser l’utilisation des semences de ferme en rendant le COV français qui les interdisait conforme au COV européen qui les utorise.
Cette affirmation est doublement fausse. En effet, le COV français n’est pratiquement plus utilisé aujourd’hui car il ne protège une variété que sur le territoire français. Depuis 1994, la plupart des variétés sont protégées par le COV européen qui étend cette protection à l’ensemble du territoire
européen. D’autre part, la nouvelle loi française et le COV européen limitent le droit de ressemer à 21 espèces en le conditionnant au paiement de royalties à l’obtenteur. Pour la majorité des espèces cultivées, les semences de ferme sont toujours interdites.
On a ensuite prétendu que la nouvelle loi visait à lutter contre le brevet sur les plantes : aucun de ses articles ne fait la moindre proposition pour empêcher le déferlement de nouveaux brevets déposés à l’Office Européen sur les gènes ou les procédés de sélection des plantes, ni pour interdire la double protection du brevet sur les gènes des variétés déjà protégées par un COV, ni pour empêcher les sociétés qui détiennent les plus gros portefeuilles de brevets de s’en servir pour s’emparer des petites ntreprises semencières françaises et de leurs COV. Elle vise au contraire à
« rémunérer la recherche » de ces seules sociétés et non la recherche de emences reproductibles libres de droit.
On peut se demander où était l’urgence de modifier dans la précipitation une vieille loi qui n’est plus utilisée, en prenant le risque de déclencher de nombreuses polémiques sur un sujet très sensible. A y regarder de plus près, on constate que cette nouvelle loi confie d’abord au pouvoir réglementaire les outils lui permettant de taxer de manière effective les semences de ferme que les agriculteurs continuent à utiliser largement et gratuitement en dépit des lois et des règlements. Puis on découvre que de nouveaux articles rajoutés au dernier moment par le Ministre de l’agriculture
lui permettent de s’attaquer à l’autoproduction et aux échanges de semences paysannes qui se développent depuis une dizaine d’année dans un espace juridique encore non réglementé. On comprend alors mieux ce que les promoteurs de la loi entendent par « rémunérer la recherche ».
Pour les obtenteurs, toute semence de ferme ou paysanne librement eproductible est d’abord une perte de marché les privant d’un « juste retour sur investissement » et qu’il convient donc de compenser ou d’interdire.