Sénat, Projet de loi autorisant la ratification du protocole additionnel de Nagoya-Kuala Lumpur sur la responsabilité et la réparation relatif au protocole de Carthagène sur la prévention des risques biotechnologiques, document N° 704, déposé au Sénat le 3 août 2018

Niveau juridique : France

EXPOSÉ DES MOTIFS (extraits):

 »1. Contexte

Le protocole de Carthagène sur la prévention des risques biotechnologiques relatif à la convention sur la diversité biologique est entré en vigueur le 11 septembre 20031(*). Il contient une disposition (article 27)2(*) qui invite la conférence des parties siégeant en tant que réunion des parties au protocole (COP-MOP) à engager, à sa première réunion, « un processus visant à élaborer des règles et procédures internationales appropriées en matière de responsabilité et de réparation pour les dommages résultant de mouvements transfrontières d’organismes vivants modifiés (…) ».

Destiné à compléter le protocole de Carthagène, le protocole additionnel de Nagoya-Kuala Lumpur sur la responsabilité et la réparation relatif au protocole de Carthagène sur la prévention des risques biotechnologiques est l’aboutissement de ce processus. Il a été adopté le 15 octobre 2010 à Nagoya, Japon, lors de la 5ème COP-MOP.

2. Contenu du protocole additionnel

Le protocole additionnel de Nagoya-Kuala Lumpur comporte un préambule et 21 articles.

Le préambule se réfère au protocole de Carthagène, dont il rappelle l’article 27, ainsi qu’aux principes 133(*) et 154(*) de la déclaration de Rio sur l’environnement et le développement5(*) issue de la conférence des Nations unies sur l’environnement et le développement réunie à Rio du 3 au 14 juin 1992.

L’objet du protocole additionnel de Nagoya-Kuala Lumpur, tel que défini par son article 1er, est de contribuer à la conservation et à l’utilisation durable de la diversité biologique, compte tenu également des risques pour la santé humaine, en établissant des règles et procédures internationales en matière de responsabilité et de réparation relatives aux organismes vivants modifiés (OVM)6(*). (…)

L’article 3 précise le champ d’application du protocole additionnel qui recouvre les dommages issus de mouvements transfrontières intentionnels d’OVM destinés à être introduits intentionnellement dans l’environnement ou utilisés directement pour l’alimentation animale et humaine ou transformés. Il s’applique aussi aux dommages résultant de mouvements transfrontières non intentionnels ou illicites d’OVM. Il s’applique également aux OVM destinés à être utilisés en milieu confiné qui, par ailleurs, sont exclus de la procédure d’accord préalable en connaissance de cause prévue par le protocole de Carthagène. Le protocole additionnel de Nagoya-Kuala Lumpur s’applique au dommage survenu dans des zones situées dans les limites de la juridiction nationale des parties. Les parties mettent en oeuvre le protocole additionnel conformément à leur droit interne.

L’article 4 dispose de la nécessité d’établir un lien de causalité entre le dommage observé et l’OVM considéré, et ce conformément au droit interne de la partie concernée.

L’article 5 définit les procédures et exigences administratives concernant les mesures d’intervention qui doivent être prises en cas de dommage ou de probabilité suffisante de dommage à la biodiversité. Il précise les rôles et devoirs des opérateurs et des autorités compétentes7(*) en la matière. En particulier, l’autorité compétente peut exiger que l’opérateur prenne des mesures ou agisse s’il ne l’a pas fait. Elle peut aussi recouvrir auprès de l’opérateur les coûts liés à l’évaluation des dommages et à la prise de mesures d’intervention appropriées.

L’article 6 offre la possibilité aux parties de prévoir dans leur droit interne les exemptions suivantes : cas fortuit ou force majeure et conflit armé ou troubles civils. De façon plus large, les parties peuvent prévoir les exemptions ou mesures d’atténuations qu’elles jugent appropriées.

L’article 7 énonce que les parties peuvent prévoir dans leur droit interne des délais, y compris en ce qui concerne les mesures d’intervention ainsi que le début de la période à laquelle un délai s’applique.

L’article 8 dispose que les parties peuvent prévoir des limites financières pour le recouvrement des coûts et dépenses liés aux mesures d’intervention.

L’article 9 énonce que le protocole additionnel est sans préjudice des droits de recours ou d’indemnisation dont peut disposer un opérateur.

L’article 10 énonce que les parties peuvent prévoir des dispositions de garantie financière dans leur droit interne si elles le souhaitent et précise que la première réunion des parties au protocole de Carthagène suivant l’entrée en vigueur du protocole additionnel demandera au secrétariat8(*) d’entreprendre une étude complète sur les modalités et impacts de mécanismes de garantie financière.

L’article 11 stipule que le protocole supplémentaire ne porte pas atteinte aux droits et obligations des États relevant des règles du droit international général qui visent la responsabilité pour des faits internationalement illicites.

L’article 12 établit les liens entre l’application du protocole et les procédures en termes de responsabilité civile. Il dispose ainsi que les parties peuvent continuer d’appliquer leur droit interne existant, y compris les procédures générales applicables à la responsabilité civile, ou élaborer des règles spécifiques en la matière ou combiner ces deux approches.

L’article 13 précise que la conférence des parties au protocole de Carthagène effectue un examen de l’efficacité du protocole additionnel cinq ans après son entrée en vigueur puis tous les cinq ans.

L’article 14 prévoit que la conférence des parties siégeant en tant que réunion des parties au protocole de Carthagène sert de réunion des parties au protocole additionnel.

De façon similaire l’article 15 stipule que le secrétariat de la convention qui est aussi celui du protocole de Carthagène fait fonction de secrétariat pour le protocole additionnel.

L’article 16 précise les relations entre le protocole additionnel et le protocole de Carthagène et la convention sur la diversité biologique. Le protocole additionnel ne porte pas atteinte aux droits et obligations des parties en vertu des deux accords susmentionnés dont les principes s’appliquent mutatis mutandis au protocole additionnel.

L’article 17 ouvre le protocole additionnel à la signature des parties au protocole de Carthagène jusqu’au 6 mars 2012.

L’article 18 énonce les modalités d’entrée en vigueur du protocole additionnel qui se fera 90 jours après le dépôt du quarantième instrument de ratification par les Etats ou organisations régionales d’intégration économique qui sont parties au protocole de Carthagène.

L’article 19 stipule qu’aucune réserve ne peut être faite au protocole additionnel.

L’article 20 établit les modalités de dénonciation du protocole additionnel, qui est possible pour une partie après un délai de 2 ans suivant l’entrée en vigueur à son égard.

L’article 21 stipule que les versions du texte dans les 6 langues officielles des Nations unies (dont le français) font foi.

Telles sont les principales observations qu’appelle le protocole additionnel de Nagoya-Kuala Lumpur sur la responsabilité et la réparation relatif au protocole de Carthagène sur la prévention des risques biotechnologiques qui, comportant des dispositions de nature législative est soumis au Parlement en vertu de l’article 53 de la Constitution. »

L’étude d’impact précise que « Du fait de la conformité du droit français aux dispositions introduites par le présent protocole, la ratification par la France n’aura pas d’impact majeur sur le droit interne et les pratiques nationales ».

L’exposé des motifs, le texte du projet de loi ainsi que l’étude d’impact sont à retrouver ici

Lien vers le dossier législatif ici

Le texte a été présenté lors du Conseil des Ministres du 3 août 2018

Extraits du compte-rendu :

« Le protocole additionnel de Nagoya-Kuala Lumpur sur la responsabilité et la réparation est l’aboutissement d’un processus engagé dans le cadre du protocole de Carthagène sur la prévention des risques biotechnologiques, lui-même établi dans le cadre de la Convention sur la diversité biologique.

Ce protocole additionnel vient compléter le protocole de Carthagène, en établissant des règles internationales en cas de dommages occasionnés sur la biodiversité par les mouvements transfrontaliers d’organismes vivants modifiés, ces derniers étant un sous-ensemble des organismes génétiquement modifiés, constitué des organismes vivants et capables de se reproduire dans l’environnement.

Le protocole de Nagoya-Kuala Lumpur est un instrument juridiquement contraignant qui permet d’établir une référence sur le plan international, sur laquelle de nombreux pays s’appuient pour établir leurs propres réglementations.

En France, la réglementation existante sur la responsabilité environnementale permet aujourd’hui de ratifier ce protocole. La ratification de ce protocole manifeste également la contribution de la France à la protection de la biodiversité. »

Lien vers le compte-rendu ici